mardi 29 octobre 2019

" La chasse aux Clowns " par Alain Fromentin


« Allez, les enfants, on éteint la télé et on s’habille. Ce soir, on a du travail, on part chasser les Clowns. »

Papa est déjà prêt, il a son filet à papillon et un grand sac en toile. Avec sa lampe frontale, on dirait un super-héros qui va partir sauver l’Univers, mais pourtant, il n’y a aucun risque, ce n’est pas les Clowns qui peuvent nous faire du mal.

Si nous avons la chance de tomber sur une bande de Clowns, ils vont s’immobiliser, leur petite combinaison va changer de couleur, passant de cette couleur étrange qu’on appelle caca-clown à une sorte de couleur noir intense et on aura qu’a les ramasser, pour les ramener à la maison.

Après on les mettra en vente sur internet et on les enverra par colis express, aux amateurs. Il y a ceux qui se contente de s’en servir en décoration, en les posant sur un rebord de cheminée, ça fait joli, ou il y a ceux qui s’en serve pour confectionner des objets divers, des pyramides de Clowns, des meubles, ou des lampadaires. 

On aime les imaginer souffrir d’être prisonnier et de rester des années immobile comme des statues.

Mais par contre, il ne faut pas essayer de les torturer, le plaisir ne dure pas longtemps, rapidement, leur combinaison devient transparente et on ne sais pas si ils se dissolvent ou ils sont télé-portés vers leur planète d’origine. Dans les deux cas de figure, savoir qu’ils arrêtent de souffrir, c’est frustrant.

Les gens détestent tellement ces saloperies de Clowns et en plus, ils sont de plus en plus nombreux, c’est comme s’ils ne comprenaient pas le sort qui les attend sur la planète Terre. 

On pense aussi que leur mission est tellement importante qu’ils préfèrent prendre le risque de terminer en abat-jour ou en nain de jardin.

Au début, quand ils sont arrivés, c’était une autre ambiance, déjà les gens ont eu du mal à le croire. Des extraterrestres !

Depuis le temps qu’avec les soucoupes volantes et les livres de science-fiction, on imaginait tous les cas de figure, ça été un branle-le- bas de combat, on a amené le premier groupe dans une sorte de conférence internationale avec les chefs d’état et les meilleurs scientifiques du monde entier.

Et on a commencé à essayer de communiquer avec eux. Que dalle ! Au début on a cru qu’on arrivait pas à dialoguer, on a fait des tas d’expériences et ça terminait toujours pareil : ils se transformaient en statuette noir intense et rien.

Et on s’est rendu compte que c’est comme si on était pour eux juste un mur qui les empêchaient de continuer leur mission mystérieuse sur la planète Terre.

Ils se mettaient en « stand bail », en attendant de pouvoir continuer à faire ce pourquoi ils étaient arrivés ici. Ils n’étaient pas venus, pour nous voir, pour essayer de communiquer avec nous. Ils comprenaient visiblement qu’il y avait des êtres humains intelligents qui essayaient d’entrer en contact avec eux, mais non, ils ne voulaient pas.

Et progressivement on s’est mis à les détester. Ils se croyaient donc tellement plus intelligent que nous ! C’est vrai que pouvoir se télé-porter sur une autre planète, notre technologie ne nous permet pas encore, les scientifiques pensaient même que comme ils le font ce n’était pas possible.

Et aussi, qu’est ce qu’ils venaient faire chez nous ? Quand on les laissait tranquille, ils se déployaient selon des schémas très compliqués, très lentement et on a pensé qu’ils étaient en train de cartographier la Terre, pour en prendre possession.

Plein de théories ont commencé à apparaître, ils allaient prendre notre place, ils s’attendaient à ce que l’on disparaisse rapidement et ils se préparaient à s’installer sur notre planète. Chez eux la vie était donc moins agréable qu’ici, ou alors ils devenaient trop nombreux.

Et à la fin, tout le monde les haïssait, même les écologistes les plus radicaux qui ne supportent pas qu’on tue le moindre insecte, ont commencé à se moquer d’eux et à les torturer.

Et c’est là qu’on les a surnommé les « Clowns » et qu’on s’est mis à les attraper pour le plaisir de les faire souffrir en les transformant en statues de décoration. 

Au début, on les a appelé les « Clowns de l’espace », mais c’était leur faire trop d’honneur, d’imaginer qu’ils venaient d’une lointaine galaxie et on ne voulait pas en regardant le ciel, la nuit, penser en voyant une étoile que c’était de là qu’ils étaient partis nous envahir. (...)

https://archive.org/details/@alain_fromentin
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