lundi 25 décembre 2023

The Doomsday argument : les mathématiques de la fin du monde



















Soit N le nombre d'individus qui sont nés ou naitront au total dans toute l'histoire de l'humanité.
En prenant un individu au hasard parmi ces individus, il y a 95% de probabilité que cet individu fasse partie des 95% "derniers" individus à être né un jour (dans le passé ou le futur). Si l'on prend maintenant comme individu au hasard un individu n contemporain, né aujourd'hui, alors le même raisonnement s'applique si l'on suppose l'équiprobabilité : il y a 95% de probabilité que cet individu fasse partie des 95% "derniers" individus.
Compte tenu du fait :
  • Qu'on estime à 60 milliards le nombre d'individus à être né depuis l'histoire de l'humanité jusqu'à la naissance de n.
  • Qu'il y a 95% de probabilité que l'individu n fasse partie des 95% (= 19/20) derniers humains, ou autrement dit qu'il ne fasse pas partie des 5% (=1/20) premiers.
Cela permet de déduire qu'il y a 95% de probabilité que le nombre d'individus N soit maximum de 60x20=1200 milliards.
Partant de cette information, on peut tenter une extrapolation de la durée de "survie" de l'humanité en fonction des estimations d'évolution de la population du monde, qui peuvent varier selon les sources, mais en supposant une évolution de la population stabilisée à 10 milliards et une espérance de vie moyenne de 80 ans, on arrive à environ 9120 ans, avant d'atteindre 1200 milliards d'individus cumulés.
La conclusion finale est donc qu'il y a 95% de probabilité d'une extinction de l'humanité avant 9120 ans dans le futur.

L’énigme, comme problème de probabilité[modifier | modifier le code]

L'argument de l'Apocalypse est quelquefois aussi présenté comme une énigme utilisant le théorème de Bayes.
Deux hypothèses sont en concurrence : la théorie A affirme que l’humanité disparaitra en 2150, et la théorie B affirme que cela sera beaucoup plus tard. Toujours selon l’hypothèse A, un humain sur 10 aura connu l’an 2000, et l’humanité aura compté 50 milliards d’individus depuis son origine. L’hypothèse B affirme qu’un humain sur 1 000 aura connu l’an 2000, et alors l’humanité aura compté le chiffre astronomique de 5 000 milliards de personnes.
La théorie A semble la moins probable : on lui associe la probabilité a priori de 1 %, tandis que la théorie B bénéficie d’une probabilité de 99 %. Maintenant, considérons un événement E, par exemple « un individu fait partie des 5 milliards d’individus qui ont connu l’an 2000 ». On peut se demander « Quelle est l’hypothèse la plus probable, sachant cet événement ? » et appliquer la formule de Bayes.
Cette formule donnerait un résultat surprenant : l’hypothèse A grimperait à 50,25 % et B chuterait à 49,75 %.









dimanche 18 décembre 2022

Chaval « Attention, Danger d'Explosion »

 

Yvan Francis Le Louarn, dit Chaval, dessinateur humoriste français, né à Bordeaux le 10 février 1915 et mort à Paris le 22 janvier 1968. Il évoque ainsi ses premiers instants de vie : 

« Je naquis moche mais pas plus que la majorité de ceux de ma génération.

Heureusement, ma mère avait du lait et m'en refilait en douce... ». 

Né dans une famille bourgeoise de Bordeaux, le gamin a toujours un crayon à  la main. Il griffonne, croque, esquisse et ébauche à longueur de journée. Souvent, l'enfant demande à son grand-père de lui dessiner " des enterrements gais ", pourvus de " détails excentriques ", lesquels déclencheront le rire. Le grand-père s'exécute. On ne refuse rien à ce gamin  jamais turbulent.

L'oncle Raphaël est son parent préféré. Ce Grand prix de Rome, misanthrope et farceur, lui offre pour ses 14 ans une caméra Bell et Howell. Avec cet engin,  le jeune Yvan réalisera ses premiers films courts.

 L'inspiration des films est surréalisante. Par le jeu du montage, il détourne les lieux les plus banals. Pleut-il abondamment sur la ville ? Voici le Grand Théâtre de Bordeaux immergé dans un aquarium où évoluent des poissons rouges.


Ses idoles se nomment Max Linder, Chaplin, Buster Keaton.Demain, ce sera Pierre Etaix.

Chaval intègre l'école des Beaux-Arts.
Il y rencontre Annie Fourtina, une étudiante qu'il épouse en 1936.
« Les beaux-Arts mènent à tout, même au mariage ! » s'exclame sa mère, ravie.
Est-il heureux ? On peut en douter. Sa mère le sauve in-extremis d'une tentative de suicide quelques temps après. A son réveil, à l’hôpital, le jeune désespéré lui reproche  de " l’avoir remis dans la vie ". Quelques jours après, il  assure à ses amis qu’il " va tenter de vivre ".

Promesse tenue jusqu'en 1968.

Dans le milieu artistique, il n'est encore personne et personne ne l'attend. Le voici donc, pendant trois ans, représentant en produits pharmaceutiques.



Il essaye, sans succès, de placer ses dessins. Les revues parisiennes ne lui répondent même pas. 


Épaulé par sa femme, toujours attentive,  qui sait le talent de son mari, il ronge son frein. Et commet quelques imprudences durant ces années noires.


Selon le Centre international de recherche sur l’anarchisme (Cira) " entre décembre 1941 et le début de l'année 1943, Yvan Le Louarn (le futur Chaval) a participé activement au journal collabo bordelais Le Progrès.


Ses dessins attaquaient les Anglais, les Américains, les Russes..". Sur l'un d'eux, il " se moque des Juifs obligés de porter l'étoile jaune. "


Un épisode peu glorieux qu'il n'évoquera guère. Il n'existe d'ailleurs que très peu de documents sur lui. Aucune interview télévisuelle. 

Le bonhomme abhorrait les confidences. Il se méfiait des snobs autant que des journalistes.
« Actuellement, et de plus en plus, vivre signifie gagner de l’argent. » Chaval
Chaval est  un misanthrope qui aime pourtant ses amis.  A sa mort, l'un d'eux évoquera

 « Un homme authentique, sans détour,  d'une sensibilité absolue. »
Un autre dira de lui : 

« C'était un être profondément triste qui ne pouvait pas se supporter longtemps avec lui-même. Les autres le sortaient sans doute de lui-même... »



Des amis lucides.
Chaval, homme discret, parfois blagueur, capable d'improviser des sketchs pour mettre les rieurs dans sa poche est un être complexe.



Cet anarchiste semble  être la proie d'orages intérieurs particulièrement violents. Il se méfie de l’ordre établi et aime à dénoncer le ridicule des conformismes sociaux. Nulle grimace de politesse en société, aucun vernis de convenance chez cet artiste dégagé. Si la conversation tombe, il la laisse tomber. Tout lui semble dérisoire. A commencer par le succès qui ne vient toujours pas.


Un oncle bohème et fantaisiste, peintre et décorateur, toujours habillé en clochard, ami d’Alfons Mucha, l’initie aux œuvres des humoristes Mark Twain, Alphonse Allais, Jerome K. Jerome. 

Il pratique la gravure et c’est à la demande d’un éditeur d’illustrer des livres qu’il s’installe à Paris. Il exerce ensuite divers métiers, et travaille pour la publicité, illustrant notamment une longue campagne pour les produits en tube, tout en publiant ses dessins d’humour.




Dans les Entretiens avec Chaval de Pierre Ajame, il dit avoir eu « mentalement un côté collabo », ajoutant : « La chose publique ne m'intéresse pas, je n'ai jamais milité. Je suis toujours resté seul. »

 C'est seulement dans les années 1950 que Chaval connaît la notoriété. Il dessine alors dans de nombreux journaux à grand tirage où son humour décalé est diversement apprécié. Il obtient en 1953 la coupe internationale du meilleur dessinateur.

 Utilisant jeux de mots et calembours, ses dessins sont remplis de dérision.

 

Son pseudonyme est choisi en hommage au facteur Cheval, qui fut transformé en Chaval après une erreur de transcription.

 Cinéaste amateur, il réalise lui-même plusieurs courts métrages à partir de ses dessins, notamment Conte médiocre et Les oiseaux sont des cons. 




Son ami Mario Ruspoli réalise deux courts métrages sur lui après son décès : Chaval et Le Chavalanthrope.

Il devient neurasthénique après la mort de sa femme, qui se suicide en mai 1967 après qu'il lui a avoué la tromper régulièrement depuis plusieurs années.

 Il finit lui aussi par se suicider le 22 janvier 1968 dans son domicile à Paris, en allumant le gaz après avoir calfeutré la porte et affiché l'avis « Attention, Danger d'Explosion » .


 

mercredi 23 novembre 2022

«Il arrive souvent que l’opinion hâtive ploie d’un côté faux, et ensuite l’affection lie l’entendement.»

 

Le biais de confirmation.

Biais cognitif qui consiste à privilégier les informations confirmant ses idées préconçues.

Par exemple, les personnes à qui on demande « Êtes-vous satisfait de votre vie sociale ? » rapportent une plus grande satisfaction que ceux interrogés avec « Êtes-vous insatisfait de votre vie sociale ? »

Durant l'Antiquité, l'historien grec Thucydide (v. 460-v. 395 av. J.-C.) écrit dans " Histoire de la guerre du Péloponnèse. ":

« C'est une habitude de l'humanité [...] d'utiliser la raison souveraine d'écarter de côté ce qu'ils ne peuvent se figurer. »

Dans " La Divine Comédie. " (1307-1321), du poète italien Dante Alighieri, le personnage de Saint Thomas d'Aquin met en garde Dante quand ils se rencontrent au Paradis :

« il arrive souvent que l’opinion hâtive ploie d’un côté faux, et ensuite l’affection lie l’entendement. »

Le philosophe et scientifique anglais Francis Bacon soutient que l'évaluation biaisée des éléments de preuve a conduit à « toutes les superstitions, que ce soit dans l'astrologie, les rêves, les présages, les jugements divins ou choses similaires ». Bacon écrit ainsi dans " Le novum organum. " (1620) :

« Une fois que la compréhension humaine a adopté une opinion (...) elle aborde toutes les autres choses pour la supporter et soutenir. Et bien qu'il puisse être trouvé des éléments en nombre ou importance dans l'autre sens, ces éléments sont encore négligés ou méprisés, ou bien grâce à quelques distinctions mis de côté ou rejetés. »

Dans " Pensées sur la comète. " (1683), texte critiquant la superstition et la tradition, le philosophe français Pierre Bayle (1647-1706) aborde le biais de confirmation et son explication par le désir :

« Là dessus ils ne consultent pas tant l'Histoire pour savoir si leur persuasion est véritable, que pour trouver qu'elle est veritable : & on ne sauroit dire l'illusion que cela fait aux sens & au jugement. En effet il arrive de là qu'on observe beaucoup mieux les faits que l'on desire de trouver, que les autres, & que l'on grossit ou que l'on diminue la qualité des evenemens selon la preoccupation. »

Dans son essai " Qu'est-ce que l'art ? ", l'écrivain russe Léon Tolstoï (1828-1910), écrit :

« Je sais que la plupart des hommes — non seulement ceux qui sont considérés intelligents, mais même ceux qui sont très intelligents et capables de comprendre les plus difficiles problèmes scientifiques, mathématiques ou philosophiques — peuvent très rarement discerner la vérité même la plus simple et évidente, s'il faut pour cela qu'ils admettent la fausseté des conclusions qu'ils ont formées, et peut-être avec encore plus de difficulté, les conclusions dont ils sont fiers, qu'ils ont enseigné à d'autres, et sur lesquelles ils ont construit leur vie. »

Dans une première expérience, les sujets devaient évaluer une autre personne sur les dimensions d'introversion et extraversion d'une personnalité, sur la base d'une entrevue. Ils ont choisi les questions d'entrevue à partir d'une liste donnée.

 Lorsque la personne interrogée a été présentée comme un introverti, les sujets ont choisi des questions qui présument de l'introversion, telles que « Qu'est-ce que vous trouvez désagréable dans les fêtes bruyantes ? »

 Lorsque la personne interrogée a été préalablement décrite comme extravertie, presque toutes les questions présumaient de l'extraversion, telles que « Que feriez-vous pour animer une fête ennuyeuse ? ». 

Ces questions chargées donnèrent peu ou bien aucune opportunité aux personnes interrogées pour infirmer les hypothèses à leur propos. Toutefois, dans une version plus récente de cette expérience, il fut proposé aux sujets de choisir des questions moins présomptives, telles que « Avez-vous peur des interactions sociales ? ». 

Les sujets préférèrent poser ces genres de questions diagnostiques (oui/non), démontrant seulement un faible biais pour les tests positifs. Ce modèle d'une préférence principale pour des tests diagnostics, et une faible préférence pour des tests positifs, a été reproduit dans d'autres études.

Les explications de motivation impliquent un effet du désir sur la croyance, parfois appelée « pensée magique ». 

Il est connu que les individus préfèrent les pensées agréables à celles désagréables dans un certain nombre de manières. Des explications en termes d'analyse coût-bénéfice supposent que les individus ne se contentent pas de tester les hypothèses d'une façon désintéressée, mais plutôt en évaluant le coût des différentes erreurs. En reprenant les idées de la psychologie évolutionniste, Jacques Friedrich suggère que les individus ne visent pas principalement à la vérité dans les tests d'hypothèses, mais plutôt à éviter les erreurs les plus coûteuses. Yaacov Trope et Akiva Liberman complètent cette théorie en prétendant que les individus comparent les deux types d'erreur : accepter une hypothèse fausse ou rejeter une hypothèse vraie.

 Par exemple, quelqu'un qui sous-estime l'honnêteté d'un ami pourrait le traiter avec méfiance et ainsi sous-estimer l'amitié. En revanche une surestimation de l'honnêteté de l'ami serait moins coûteuse. Dans ce cas, il serait rationnel de chercher, évaluer ou se souvenir des preuves d'honnêteté d'une manière biaisée.

 Quand quelqu'un donne en première impression celle d'être introverti ou extraverti, des questions qui correspondent à cette impression apparaissent comme plus empathiques. Ceci suggère qu'en parlant à quelqu'un qui semble introverti, il est un signe de meilleures compétences sociales de demander : « Vous sentez vous mal à l'aise dans des situations sociales ? » plutôt que « Aimez-vous les fêtes bruyantes ? ».

Dans la finance

Le biais de confirmation peut amener les investisseurs à être trop confiants, en ignorant les indices que leur stratégie les conduit à des pertes. Dans des études sur les marchés financiers liés aux résultats d'élections, les investisseurs firent de plus importants bénéfices quand ils résistèrent à ce biais.

 Par exemple, les participants qui interprétèrent, de manière neutre plutôt que partisane, la prestation d'un candidat lors d'un débat, étaient plus susceptibles de faire des profits.

Pour lutter contre l'effet de biais de confirmation, les investisseurs peuvent essayer d'adopter un point de vue contraire « pour les besoins de l'argumentation ». Une telle technique consiste à imaginer l'effondrement de leurs investissements, et s'interroger alors sur les motifs de cet effondrement.

En politique et en droit

Nickerson fait valoir que le raisonnement dans des contextes juridiques et politiques est parfois inconsciemment biaisé, favorisant les conclusions identiques à celles déjà faites par les juges, jurés ou gouvernements.

 Puisque les preuves dans un procès devant jury peuvent être complexes, et puisque les jurés prennent souvent leur décision au sujet du verdict dès le début du procès, il est raisonnable de s'attendre à un effet de polarisation d'attitude. 

La prédiction, de jurés devenant plus extrêmes dans leurs opinions en étant confrontés à des preuves plus nombreuses, a été confirmée dans des expériences avec des simulacres de procès. 

Parce qu'ils ne garantissent pas que les opinions concurrentes soient diffusées, la procédure inquisitoire de la justice pénale peut être plus faussée par le biais de confirmation que la procédure accusatoire.

Le biais de confirmation peut être un élément dans la création ou l'extension de conflits ; des débats chargés émotionnellement jusqu'aux guerres.

 En interprétant la preuve en leur faveur, chaque partie adverse peut devenir trop confiante dans l'idée qu'elle est dans la meilleure position. D'autre part, le préjugé de confirmation peut amener les gens à ignorer ou mal interpréter les signes d'un conflit imminent ou naissant. 

Par exemple, les psychologues Stuart Sutherland et Thomas Kida ont chacun fait valoir que l'amiral américain Husband Kimmel a montré un biais de confirmation en sous-estimant les premiers signes de l'attaque de Pearl Harbor.

Une étude des politologues sur deux décennies, par Philip E. Tetlock, démontre que, dans l'ensemble, leurs prédictions ne furent guère plus correctes que le pur hasard. 

Tetlock divisa ces experts entre les « renards » soutenant de multiples hypothèses, et les « hérissons » plus dogmatiques. En général, les prévisions des hérissons furent beaucoup moins exactes. 

Tetlock expliqua leur échec par le biais de confirmation, et en particulier, leur incapacité à utiliser les nouvelles informations qui contredisaient leurs précédentes théories.

Une personne croyant en l'existence de phénomènes paranormaux aura tendance à sélectionner des informations qui confirmerait leur existence plutôt que des données prouvant le contraire. 

De la même façon, une personne adhérant à des principes pseudo-scientifiques aura tendance — contrairement au sceptique — à mettre de côté l'absence de preuve ou les critiques scientifiquement fondées, et à chercher des confirmations de ses croyances.

Pour combattre cette tendance, la formation scientifique enseigne des moyens d'éviter ou limiter ce biais.

 La conception des protocoles et plan d'expériences implique ainsi la répartition au hasard et les essais en double aveugle, de même que le processus social d'évaluation par les pairs est pensé pour atténuer l'effet des préjugés individuels des scientifiques, même s'il a été soutenu qu'un tel biais pouvait jouer un rôle dans ce processus d'évaluation.




 

vendredi 28 octobre 2022

“ Le Cancre ” par Jacques Prévert

 


“ Le Cancre ” tiré du recueil 

“ Paroles ” par Jacques Prévert


Il dit non avec la tête

mais il dit oui avec le coeur

il dit oui à ce qu’il aime

il dit non au professeur

il est debout

on le questionne

et tous les problèmes sont posés

soudain le fou rire le prend

et il efface tout

les chiffres et les mots

les dates et les noms

les phrases et les pièges

et malgré les menaces du maître

sous les huées des enfants prodiges

avec les craies de toutes les couleurs

sur le tableau noir du malheur

il dessine le visage du bonheur.




mardi 26 juillet 2022

Paroles et traduction du morceau du groupe The Clash : " The Call Up " ( " L'appel D'en Haut " )


The Call Up

(L'appel D'en Haut)


It's up to you not to heed the call-up

C'est à toi de ne pas faire attention à l'appel

'N' you must not act the way you were brought up

Et tu ne dois pas agir comme on t'a élevé

Who knows the reasons why you have grown up ?

Qui connait les raisons pour lesquelles tu as grandi ?

Who knows the plans or why they were drawn up ?

Qui connaît les plans ou pourquoi ils ont été dessinés ?


It's up to you not to heed the call-up

C'est à toi de ne pas faire attention à l'appel

I don't wanna die !

Je ne veux pas mourir !

It's up to you not to hear the call-up

C'est à toi de ne pas entendre l'appel

I don't wanna kill !

Je ne veux pas tuer !


For he who will die

Pour lui qui va mourir

Is he who will kill

Est-il celui qui va tuer


Maybe I wanna see the wheatfields

Peut-être que je veux voir les champs de blé

Over Kiev and down to the sea

Depuis Kiev jusqu'à la mer


All the young people down the ages

Tous les jeunes gens en bas âges

They gladly marched off to die

Ils ont fièrement marché vers la mort

Proud city fathers used to watch them

Les pères fiers de la ville les regardaient

Tears in their eyes

La peur dans leurs yeux

There is a rose that I want to live for

Il y a une rose pour laquelle je voudrais vivre

Although, God knows, I may not have met her

Bien que, Dieu le sait, je ne l'ai pas rencontrée

There is a dance an' I should be with her

Il y a une danse et je dois être avec elle

There is a town - unlike any other

Il y a une ville - différente des autres


It's up to you not to hear the call-up

C'est à toi de ne pas entendre l'appel

'N' you must not act the way you were brought up

Et tu ne dois pas agir comme on t'a élevé

Who give you work an' why should you do it ?

Qui t'a donné du boulot et pourquoi devrais-tu le faire ?

At fifty five minutes past eleven

à 11 h 55

There is a rose...

Il y a une rose...

Yeah !







dimanche 17 juillet 2022

Ishi « le dernier des Yahi »




Ishi « le dernier des Yahi »


Ishi était le dernier membre connu des Amérindiens personnes Yahi de l'état actuel de la Californie aux États-Unis . Le reste des Yahi (ainsi que de nombreux membres de leur tribu parent, les Yana ) ont été tués lors du génocide californien au 19ème siècle.

 Ishi, qui a été largement acclamé comme le "dernier Indien sauvage" en Amérique, a vécu la majeure partie de sa vie isolé de la culture américaine moderne. En 1911, âgé de 50 ans, il a émergé dans une grange et un corral, à trois kilomètres du centre-ville d' Oroville, en Californie .

Ishi a été accueilli par des anthropologues de l' Université de Californie à Berkeley , qui l'ont étudié et l'ont engagé comme concierge. Il a vécu la plupart de ses cinq dernières années dans un bâtiment universitaire à San Francisco . Sa vie a été décrite et discutée dans plusieurs films et livres, notamment le récit biographique Ishi dans Two Worlds publié par Theodora Kroeber en 1961. 




En 1865, Ishi et sa famille ont été attaqués dans le massacre des Trois Knolls , dans lequel 40 de leurs membres de la tribu ont été tués. Bien que 33 Yahi aient survécu pour s'échapper, les éleveurs ont tué environ la moitié des survivants. Les derniers survivants, dont Ishi et sa famille, se sont cachés pendant 44 ans. On pensait que leur tribu était éteinte. 

Avant la ruée vers l'or de Californie de 1848–1855, la population de Yahi comptait 404 personnes en Californie, mais le Yana total dans la région plus grande comptait 2 997.

La ruée vers l'or a amené des dizaines de milliers de mineurs et de colons dans le nord de la Californie, exerçant une pression sur les populations autochtones. L'exploitation aurifère a endommagé les réserves d'eau et tué des poissons; le cerf a quitté la région. Les colons ont apporté de nouvelles maladies infectieuses telles que la variole et la rougeole . 

Le groupe du nord de Yana s'est éteint tandis que les groupes du centre et du sud (qui sont devenus plus tard une partie de Redding Rancheria ) et les populations de Yahi ont chuté de façon spectaculaire. À la recherche de nourriture, ils sont entrés en conflit avec les colons, qui ont mis des primes de 50 cents par cuir chevelu et 5 dollars par tête aux indigènes. En 1865, les colons ont attaqué le Yahi alors qu'ils dormaient encore.

Richard Burrill a écrit, dans Ishi Rediscovered :

«En 1865, près du lieu spécial de Yahi, Black Rock, les eaux de Mill Creek sont devenues rouges lors du massacre des Trois Knolls. 'Seize' ou 'dix-sept' combattants indiens ont tué une quarantaine de Yahi, dans le cadre d'une attaque de représailles contre deux femmes blanches et un homme tué dans la maison des ouvriers à Lower Concow Creek, près d'Oroville. Onze des combattants indiens ce jour-là étaient Robert A. Anderson, Hiram Good , Sim Moak, Hardy Thomasson, Jack Houser, Henry Curtis, son frère Frank Curtis, ainsi que comme Tom Gore, Bill Matthews et William Merithew, WJ Seagraves a également visité le site, mais quelque temps après la bataille.

Robert Anderson a écrit: "Dans le ruisseau, ils ont sauté, mais peu sont sortis vivants. Au lieu de cela, de nombreux cadavres ont flotté dans le courant rapide."

 Une Indienne captive nommée Mariah de Big Meadows (aujourd'hui sur le lac Almanor), a été l'une de celles qui ont réussi à s'échapper. Les trois Knolls massacre est également décrit dans Theodora Kroeber de Ishi dans deux mondes.

Depuis, on a appris davantage. On estime qu'avec ce massacre, tout le groupe culturel d'Ishi, les Yana / Yahi, aurait pu être réduit à une soixantaine d'individus. De 1859 à 1911, la bande éloignée d'Ishi est devenue de plus en plus infiltrée par des représentants indiens non-Yahi, tels que des individus de Wintun , Nomlaki et Pit River .

En 1879, le gouvernement fédéral a ouvert des internats indiens en Californie. Certains hommes des réserves sont devenus des renégats dans les collines. Des volontaires parmi les colons et les troupes militaires ont mené des campagnes supplémentaires contre les tribus indiennes du nord de la Californie au cours de cette période.

À la fin de 1908, un groupe d'arpenteurs est tombé sur le camp habité par deux hommes, une femme d'âge moyen et une femme âgée. C'étaient respectivement Ishi, son oncle, sa sœur cadette et sa mère. Les trois premiers ont fui tandis que la seconde s'est cachée dans des couvertures pour éviter d'être détectée, car elle était malade et incapable de fuir. Les enquêteurs ont saccagé le camp et la mère d'Ishi est décédée peu après son retour. Sa sœur et son oncle ne sont jamais revenus.

Après la rencontre de 1908, Ishi passa encore trois ans seul dans le désert. Mourant de faim et n'ayant nulle part où aller, Ishi, vers l'âge de 50 ans, a été retrouvé avant le coucher du soleil par Floyd Hefner. Le shérif local a mis Ishi en garde à vue.

«L'homme sauvage» a attiré l'imagination et l'attention de milliers de spectateurs et de chercheurs de curiosités.


 



Le professeur Kroeber réussit à gagner la confiance d’Ishi. Il l’installe au Musée d’Anthropologie de l’Université de Californie à San Francisco. Ishi, qui a appris un peu d’anglais et s’est adapté à la vie américaine, se révèle un remarquable informateur pour les anthropologues. 







Il montre comment chasser, pêcher, construire des abris, comment fabriquer des armes et des outils, allumer un feu, préparer la nourriture, utiliser les herbes médicinales. Il chante les chants de son peuple, il raconte ses légendes. Il montre un grand respect pour les morts. 



Il est habituellement affable et souriant, mais il est secoué de crises d’angoisse quand il se rend avec Kroeber et Waterman sur les lieux où les siens ont vécu. Il se lie d’amitié et même d’affection avec Kroeber et sa famille, ainsi qu’avec le médecin qui s’occupe de lui.






dimanche 10 juillet 2022

Sapho par Paul Lafargue

 



Sapho

par Paul Lafargue

Le roman de M. Daudet a été un succès ; des milliers d'exemplaires ont été enlevés ; le sujet, arrangé pour la scène, fait salle comble. Il a été loué, discuté, critiqué doucement par la presse. Les gens de lettres, quand ils en reparlent, citent avec convoitise la somme qu'il a rapportée à son auteur. Le succès monétaire est la forme bourgeoise la plus élevée de la gloire, celle que prisent et que préfèrent les artistes et les écrivains modernes. M. Zola, dans un de ses articles de critique, prenait pour mesure littéraire le nombre d'éditions écoulées, c'est-à-dire des pièces de vingt sous empochées. Les bourgeois de toute industrie et de tout commerce partagent cette opinion ; ils ont proclamé Victor Hugo le plus grand poète des temps présents et passés : n'est-il pas mort cinq fois millionnaire.

Autrefois, quand le public acheteur de livres n'était pas encore constitué, les écrivains, même ceux de génie, étaient de pauvres hères, vivant des faveurs seigneuriales et royales, ce qui ne les empêchait pas de mourir misérables. Beaucoup d'entre eux entraient dans la domesticité des nobles ; vivant à leur table, rédigeant leurs lettres et leurs billets doux, composant leurs madrigaux. La noblesse avait les gens de lettres pour habiller galamment son esprit, et des valets pour soigner sa toilette de corps.

De nos jours la clientèle littéraire existe. A peine échappée de la terreur jacobine, la bourgeoisie se jeta sur le roman ; on ne pouvait suffire à sa boulimie, tous les jours de nombreux romans nouveaux en deux et quatre volumes étaient mis en vente au Palais-Royal qui portait alors le nom de Palais Egalité. Les femmes étaient les infatigables pondeuses des romans de l'époque ; les hommes, absorbés par la politique, la guerre, les tripotages financiers et le vol des biens nationaux, n'avaient pas de loisirs pour écrire. Le roman est la forme littéraire par excellence de la bourgeoisie, celle qui, peut-on dire, est née et s'est développée avec elle. Le fait historique est là, je n'ai pas à en rechercher les causes dans cet article.

La bourgeoisie et ses domestiques, les portières et les cuisinières, ont fourni la grande masse de la clientèle. Je dois ajouter, et sans insister, qu'il s'est créé dans les grandes villes une clientèle populaire pour un certain genre de romans bourrés de crimes, d'aventures policières et de péripéties dramatiques et fantaisistes. La bourgeoisie a encouragé le développement de cette littérature niaise et démoralisante ; elle occupe l'esprit populaire, l'endort et le détourne, ainsi que les chinoiseries politiques du radicalisme, de l'étude de ses véritables intérêts de classe. La Sapho de M. Daudet n'a pas été lue et achetée par cette clientèle, mais par la bourgeoisie frottée de littérature et qui s'enorgueillit d'aimer les études psychologiques.

M. Daudet a accommodé le plat littéraire qui lui convenait ; il lui a servi une étude psychologique selon ses goûts et ses capacités intellectuelles. Sapho, bâtie de pièces rapportées, mal rapprochées et mal collées, ressemble à ces mannequins vertébrés et articulés que les peintres et les sculpteurs habillent et placent dans des poses héroïques. Le livre se rachète par les personnages épisodiques, par les racontars sur la vie des femmes illégitimes de ces messieurs : les détails, pris sur le vif, sont dits avec un art mièvre, mais exquis dans sa mignardise. Le roman satisfît la bourgeoisie, qui demande qu'on l'amuse par des reportages piquants, bien tournés ; qu'on ne blesse pas ses préjugés et qu'on flatte ses instincts, ses sentiments et ses passions. M. Daudet a parfaitement rempli cette dernière partie de la tâche imposée à tout écrivain bourgeois : il est peu de livres plus bourgeois que Sapho.

Le bourgeois français est un être raisonnable, qui ne se laisse entraîner par la passion que rarement ; il se marie, la trentaine passée, pour faire une fin, selon son expression, à moins que, par hasard, il ne rencontre plus tôt une dot appétissante, une bonne affaire d'argent : alors il sacrifie sa jeunesse à sa femme. N'ayant pas fait voeu de chasteté et ne se livrant pas à des plaisirs solitaires ou à la boisson, comme les jeunes bourgeois d'Angleterre, il batifole avec les vierges folles de leur corps. Dans les temps préhistoriques de Paul de Kock et d'Eugène Sue, il existait une classe d'ouvrières, laborieuses, gagnant assez bien leur vie avec leur aiguille, mais folichonnes, amies du plaisir, ayant le coeur sur la main, courageuses, prenant les jours comme ils venaient, les amants quand il y avait une partie de bateau à Saint-Ouen, un dîner au Palais-Royal, une soirée à l'Ambigu. La grisette joyeuse et se contentant de peu est morte et enterrée, tuée par l'exploitation grippe-sou des grands magasins et des grands ateliers et par la prostitution légale et illégale.

Le jeune bourgeois, au grand déplaisir de ses père et autres parents plus ou moins naturels, doit aujourd'hui dépenser de l'argent pour tuer le temps qui s'écoule entre la puberté et le mariage. Comme il ne trouve plus de grisettes se donnant pour le plaisir, il doit se contenter des tristes femmes que la misère et l'exploitation de ses père et oncles oblige à se vendre pour vivre. S'il a des goûts relevés et chevaleresques, il prend une femme qui ne fait pas passer la rue par son lit. Mais la maîtresse de nos jours ne se contente plus du flan et de la galette ; quand elle accroche un fils de bourgeois, eile exige de la soie, des fourrures et du palissandre. Elle coûte beaucoup d'argent, et ça épouvante le bourgeois. Il se forme alors des sociétés anonymes pour entretenir une femme selon les exigences du jour. La cocotte accorde à l'un des associés le mardi, à l'autre le samedi, à celui-ci l'après-midi, à celui-là la nuit. Il arrive que dans ces ménages sociétaires, le jeune bourgeois trouve plus qu'il n'avait espéré : ainsi que dit le vieux Mathurin Regnier, s'il apporte le poisson, on lui fournit la sauce.

L'idéal bourgeois serait de trouver une femme qui le garantît des coups de pied de Vénus, qui lui coûtât peu d'argent et qu'il pourrait rejeter comme l'écorce d'une orange dont on a exprimé le jus.

Le héros de M. Daudet avait eu le bonheur de tomber sur une femme qui remplissait toutes les conditions de l'idéal bourgeois : il s'empresse de s'acoquiner avec elle. Sapho qui aime les cheveux frisés, s'amourache de Gaussin, garçon insipide et nul : loin de l'entraîner dans des dépenses, elle lui arrange un intérieur calme ; elle lui procure les plaisirs les plus raffinés de l'alcôve sans qu'il ait besoin de perdre son temps et son argent à courir après les cotillons ; elle tire son oncle d'un mauvais pas, en lui avançant une dizaine de mille francs gagnés le diable sait comment ; elle disparaît d'elle-même, sans menaces de vitriol, de coups de revolver, juste au moment où le jeune bourgeois entre dans une carrière officielle et va se porter candidat à quelque dot sérieuse.

M. Dumas, pas le père, le fils, dans une de ses préfaces qui rachetant leur banalité par leur longueur, dit qu'il est difficile, sinon impossible, de transporter sur la scène les rapports réels entre femmes et hommes de la vie mondaine, de peur d'effaroucher la pudeur de ces dames qui ne sont chastes que par les oreilles. S'il faut adoucir les tons et idéaliser la réalité pour ne pas blesser les cocottes légitimes et illégitimes du monde de M. Dumas, il faut aussi, dans les romans, ménager les sentiments de la bourgeoisie. M. Daudet ne pouvait, en psychologue hardi, fendre la crâne bourgeois et étaler brutalement aux yeux de tous son idéal de la maîtresse ; d'ailleurs, il est lui-même trop foncièrement bourgeois pour exposer crûment cet idéal qui est le sien : il farde.

Sapho, la fille de joie corrompue par la canaille du beau monde, rend à son amant des services d'amour et d'autre nature, pour le plaisir qu'elle y éprouve, ne demande rien, pas même de la reconnaissance. Gaussin, l'amant qui, comme un boeuf à l'étable, s'engraisse tranquillement dans ce ménage à la colle, qui se laisse dorloter, qui n'apporte qu'un amour las, regrette auprès de Sapho les plaisirs qu'il aurait pu prendre ailleurs, se désespère d'avoir manqué un mariage bâti trop romanesquement pour n'être pas une affreuse blague, lui reproche la colère d'un père ridicule à être empaillé, tellement il est rococo et en dehors du mouvement bourgeois. C'est renversant.

Mais c'est ce renversement de rôles qui a plu au bourgeois. Une des nobles passions de l'âme bourgeoise est de vouloir payer le moins cher possible tout service reçu. Le bourgeois aime à égayer sa jeunesse avec des femmes, mais il a une peur bleue que les femmes avec lesquelles il a vécu et qu'il délaisse à la première occasion, ne viennent un jour lui réclamer des secours. Bien avant la séparation, il se pose en martyr ; il raconte à celles qui ont le malheur de s'attacher à lui, qu'il se sacrifie en jouissant d'elles, qu'il mériterait récompense, comme un Alphonse ; il les paye d'avance en monnaie de singe.

M. Daudet a pu, avec l'approbation de tout honnête bourgeois, dédier son roman à ses enfants. Un jeune artiste de ma connaissance, bourgeois jusqu'au fond de ses culottes, me disait : "Je me souhaite une Sapho, pour attendre mes trente ans."

Au siècle dernier, le chevalier Desgrieux aimait follement Manon Lescaut ; pour la suivre, vivre de sa vie, il jetait par dessus bord, sans hésitation, convenances sociales, famille, avenir, et ne demandait à la charmante fille que son amour. Les hommes de la noblesse étaient capables d'oublier leur intérêt personnel ; le bourgeois est un animal si égoïste, qu'il ne peut même supposer qu'on puisse attendre de lui une action qui serait contraire à ses intérêts.

Le Socialiste, 2 janvier 1886.

https://www.marxists.org/francais/lafargue/works/1886/01/lafargue_18860102.htm


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