mercredi 29 avril 2015

Pour les agriculteurs, ressemer sa propre récolte sera interdit ou taxé ( 29 novembre 2011 )



Dans le champ de l'agriculture, l'usage libre et gratuit des graines ne sera bientôt plus qu'un doux souvenir rappelant des méthodes paysannes d'un autre temps. Surnommées "semences de ferme", ces graines étaient jusqu'alors sélectionnées par les agriculteurs au sein de leurs propres récoltes et replantées l'année suivante.







Depuis plusieurs décennies, ces pratiques n'allaient déjà plus de soi lorsque ces semences étaient protégées par un Certificat d'obtention végétale (COV) – à savoir le droit de propriété des "obtenteurs" de l'espèce. Ressemer ces graines était théoriquement interdit. Mais cet usage demeurait, dans les faits, largement toléré en France. Il est désormais strictement réglementé par une proposition de loi UMP adoptée lundi 28 novembre par le Parlement.

"Sur les quelque 5 000 variétés de plantes cultivées dans le commerce, 1 600 sont protégées par un COV. Ces dernières représentent 99 % des variétés cultivées par les agriculteurs", explique Delphine Guey, du Groupement national interprofessionnel des semences (GNIS). Or, environ la moitié des céréales cultivées étaient jusqu'ici ressemées par les agriculteurs, selon la CNDSF (Coordination nationale pour la défense des semences fermières). Presque toujours illégalement, donc. Mais le temps de "l'incertitude juridique" semble révolu : pour le ministre de l'agriculture, Bruno Le Maire, ces semences "ne peuvent pas être libres de droit, comme elles le sont aujourd'hui". (…)

Plusieurs associations écologistes et paysannes craignent ainsi une mainmise accrue de la filière semencière sur l'accès aux graines, via un droit de propriété étendu aux récoltes et aux graines qui en sont issues. Avec la taxe, "même les agriculteurs qui se passent des semences commerciales doivent payer pour ces semences", déplore Guy Kastler. Le militant redoute que la part des semences de ferme ne s'amenuise, à mesure que ces dernières deviennent plus chères et donc moins intéressantes pour l'agriculteur. Entre cette taxe et l'interdiction de ressemer ses propres graines, l'agriculteur est de plus en plus incité, non plus à produire, mais à acheter ses semences. D'où la crainte d'une dépendance accrue aux entreprises semencières.


Mais du point de vue de Xavier Beulin, la contribution de tous à la recherche sur les espèces cultivées se justifie, dans la mesure où même les semences de ferme en sont généralement issues. Dressant un parallèle avec la loi Hadopi visant à "protéger les créateurs" de films et de musique, le président de la FNSEA estime qu'il est "normal que [ceux qui utilisent des semences fermières] participent aussi au financement de la création variétale, puisqu'ils en bénéficient". Opposé à cet argumentaire, le syndicat Coordination rurale relève sur son site que Xavier Beulin n'est pas seulement à la tête du premier syndicat agricole. Il dirige aussi le groupe Sofiprotéol"qui détient des participations dans plusieurs grands groupes semenciers français (Euralis Semences, Limagrain...)"(…)


 
Autre crainte : l'impact de cette mesure sur la diversité agricole. Certes, ressemer une même variété – presque toujours issue de la recherche – n'accroît pas, a priori, la biodiversité. D'autant que "pour les grandes cultures, aucune variété utilisée n'est le fruit d'une conservation ancestrale ; toutes ont été développées grâce à la création variétale", souligne Xavier Beulin.
Toutefois, ressemer sa récolte peut entraîner des variations dans l'espèce, et donc favoriser cette biodiversité, nuance Guy Kastler. "Des caractères nouveaux apparaissent, permettant à la plante d'être mieux adaptée au sol, au climat, aux conditions locales. Il est alors possible de réduire les engrais et les pesticides. A l'inverse, les semenciers adaptent les plantes aux engrais et aux pesticides, qui sont partout les mêmes." Ils tendraient donc plutôt à créer de l'uniformité dans les plantes, où qu'elles soient cultivées.

 
http://www.lemonde.fr/planete/article/2011/11/29/pour-les-agriculteurs-ressemer-sa-propre-recolte-sera-interdit-ou-taxe_1610778_3244.html
 



Europe : les multinationales peuvent désormais breveter le vivant.


C'est une décision de la Grande Chambre de Recours de l'Office Européen des Brevets datée du 25 mars 2015 qui a permis de faire avancer "la cause" des multinationales sur le brevetage du vivant .


A la question "si l'on découvre un lien entre une séquence génétique existant naturellement dans une plante cultivée et un caractère particulier de cette plante, peut-on devenir propriétaire de toutes les plantes qui expriment ce caractère" , la Grande Chambre de Recours de l'Office Européen des Brevets a répondu …"oui".

lundi 13 avril 2015

" Le paradoxe de Simpson "

 
Le paradoxe de Simpson ou effet de Yule-Simpson est un paradoxe statistique décrit par Edward Simpson en 1951 et George Udny Yule en 1903, dans lequel le succès de plusieurs groupes semble s'inverser lorsque les groupes sont combinés. Ce résultat qui paraît impossible est souvent rencontré dans la réalité, en particulier dans les sciences sociales et les statistiques médicales.


Calculs rénaux : quel traitement choisir ?


Pas de chance, on vient de vous découvrir des calculs au rein. Heureusement des traitements existent, et à l’hopital le médecin vous en présente deux. Le premier (appelons le « Traitement A ») consiste en une chirurgie ouverte, alors que le second (« Traitement B ») est une chirurgie qui se fait par de petits trous percés à travers la peau. Le médecin vous demande quel traitement vous préférez. Comme vous souhaitez avant tout guérir, vous demandez au praticien les statistiques de succès de ces deux traitements.

« Oh c’est très simple, vous répond le médecin, les deux traitements ont été testés chacun 350 patients, et voici les chiffres : le traitement A a fonctionné dans 273 cas et le traitement B dans 289″.

L’affaire semble entendue, le traitement B a marché avec 83% de réussite, contre 79% seulement pour le traitement A. Vous choisissez donc le traitement B.

Mais en repartant de l’hôpital, vous croisez un autre médecin à qui vous demandez son avis sur les traitements. « Oh c’est très simple, vous répond-il : les deux traitements ont été testés 350 fois chacun sur des patients, ces derniers pouvant être atteints soit de ‘petits’ calculs, soit de ‘gros’ calculs, et voici les chiffres » :





Comme vous pouvez le constatez, si vous avez des gros calculs, le traitement A fonctionne mieux, et si vous avez des petits calculs, le traitement A est aussi le plus efficace. Voilà qui est en totale contradiction avec ce que vous a dit le premier médecin. Et pourtant, vous avez beau compter et recompter, sur la ligne « Total », il s’agit bien des mêmes chiffres que ceux présentés par le premier médecin…

Comment est-il possible que le traitement B soit meilleur au global, mais qu’il soit inférieur au traitement A aussi bien sur les petits que sur les gros calculs ? Et ça n’est pas une blague, ces chiffres sont issus d’une vraie étude [1] ! Il n’y a aucune entourloupe statistique ou aucune manipulation, ce que vous lisez là, c’est bien la réalité des chiffres. Vous avez là un bel exemple du paradoxe de Simpson. ( … )

Tout d’abord comment s’énonce ce paradoxe : il s’agit du fait qu’une corrélation peut disparaître ou même s’inverser suivant que l’on considère les données dans leur ensemble, ou bien segmentées par groupes.
Pour que le paradoxe se produise, il faut 2 ingrédients :
  • Premièrement il faut une variable qui influe sur le résultat final (le « groupe »), et qui n’est pas forcément explicitée au départ. On appelle cela un facteur de confusion. Il s’agit de la taille des calculs dans le premier exemple, car celle-ci influe sur la probabilité de succès du traitement, et de l’âge des personnes dans le second exemple, lequel évidemment joue sur la mortalité.
  • Deuxièmement, il faut que l’échantillon qu’on étudie ne soit pas distribué de manière homogène : dans le cas du tabac, il y a plus de vieilles femmes dans l’échantillon des non-fumeuses que chez les fumeuses; dans le cas des reins, le traitement « A » est plus souvent donné sur les gros calculs, et le « B » sur les petits (vous pouvez retourner voir les chiffres).
Quand ces deux conditions sont réunies, le paradoxe de Simpson peut se produire ! C’est-à-dire qu’à cause de la distribution hétérogène de l’échantillon, regrouper les données pointe une tendance qui peut être fausse, et qui disparaît si on analyse les données en séparant selon le facteur de confusion. ( … )

Comment se prémunir du paradoxe de Simpson


J’imagine que vous voyez aisément le potentiel de manipulation qui se cache derrière ce paradoxe : on peut vous faire croire à quelque chose (le chômage a baissé, tel traitement marche mieux, tel individu est meilleur, etc.) alors qu’en regardant les chiffres dans le détail, les effets peuvent disparaître ou s’inverser ! Alors que faire ?

Tout d’abord, il faut se rappeler : cet effet se produit quand il existe une variable cachée influente, et que l’échantillon sur lequel on se base n’est pas homogène. En sciences, c’est pour cela que l’on préfère en général des expériences « randomisées », qui permettent d’assurer une distribution homogène : par exemple si vous avez des calculs rénaux et que vous participez à une expérience pour comparer les traitements, on vous assigne au hasard le traitement A ou B, sans que la taille des calculs influe sur la décision. On gomme ainsi l’inhomogénéité de distribution, et le paradoxe disparaît : le traitement A sera bien vu comme étant le meilleur.

Quand on vous présente des chiffres, il faut donc avoir l’oeil critique, et être particulièrement méfiants quand ces chiffres sont issues de données analysées a posteriori, plutôt que sur un échantillon expérimental qu’on a soi-même construit a priori (en randomisant). (Réfléchissez au point suivant : conclure que « Le lit est l’endroit le plus dangereux du monde, c’est là que la plupart des gens meurent » c’est se tromper car on utilise des données non-randomisées)

Enfin rappelez-vous, ce paradoxe se produit quand il existe une variable cachée fortement influente. Cela signifie que les chiffres bruts ont peu de sens, et doivent être critiqués par un expert du domaine, susceptible de pointer l’existence d’un tel facteur. A l’heure où fleurit la mode du « fact-checking », on a un peu tendance à nous faire croire que les chiffres seraient la vérité « nue ». Non, la vérité nue n’existe pas, et on aura toujours besoin de gens au courant pour interpréter correctement des chiffres, qu’ils soient scientifiques, économiques ou médicaux.

https://sciencetonnante.wordpress.com/2013/04/29/le-paradoxe-de-simpson/

Quelle est la différence entre un optimiste et un pessimiste ?

L'optimiste pense que l'on vit dans le meilleur des mondes possibles.
Le pessimiste pense que malheureusement c'est vrai.