jeudi 24 juin 2010

" Pourquoi l'avenir n'a pas besoin de nous ". Par Bill Joy



Nos techniques les plus puissantes du 21ème siècle - la robotique, le génie génétique et les nanotechnologies - menacent de faire de l'homme une espèce en dange


Par Bill Joy, co-fondateur et Directeur Scientifique de Sun Microsystems, et coauteur de La Spécification du Langage Java.

" Admettons d'abord que les informaticiens réussissent à développer des machines intelligentes qui peuvent tout faire mieux que les humains. Dans ce cas tout le travail sera vraisemblablement fait par d'énormes systèmes fortement organisés de machines et aucun effort humain ne sera nécessaire. Deux cas seulement pourraient se produire. On pourrait permettre aux machines de prendre toutes leurs décisions sans intervention humaine, ou bien le contrôle humain des machines pourrait être conservé. ( ... )

Bien sûr, la vie sera à ce point sans but que les gens devront être biologiquement ou psychologiquement modifiés soit pour supprimer leur pulsion de dominance ou pour leur faire "sublimer" leur pulsion de dominance dans un passe-temps inoffensif. Ces êtres humains modifiés peuvent être heureux dans une telle société, mais ils ne seront très certainement pas libres. Ils auront été réduits au statut d'animaux domestiques. "

Dans le livre, on ne découvre qu'en tournant la page que l'auteur de ce passage est Théodore Kaczynski - Unabomber. Je ne suis aucunement un apologiste de Kaczynski. Ses bombes ont tué trois personnes pendant une campagne de terreur de 17 ans et ont blessé plusieurs autres. Une de ses bombes a gravement blessé mon ami David Gelernter, un des informaticiens les plus brillants et les plus visionnaires de notre temps. Comme beaucoup de mes collègues, j'ai senti que j'aurais facilement pu être la cible suivante d' Unabomber.

Les actions de Kaczynski étaient meurtrières et, à mon avis, d'un fou criminel. Il est clairement un Luddite, mais se limiter à cette affirmation n'écarte pas son argument; aussi difficile qu'il soit pour moi de le reconnaître, il y a un certain mérite dans le raisonnement de ce passage. Je me suis senti contraint d'y faire face. ( ... )

Habitués à vivre avec des percées scientifiques presque de routine, il nous reste à nous habituer au fait que les techniques les plus captivantes du 21ème siècle - la robotique, le génie génétique et les nanotechnologies - posent une menace différente de celle des techniques qui sont apparues auparavant. Spécifiquement, les robots, les organismes génétiquement modifiés et les nanorobots partagent un facteur d'amplification dangereux : Ils peuvent s'auto-reproduire. Une bombe explose seulement une fois - mais un robot peut en devenir plusieurs et on peut en perdre rapidement le contrôle. ( ... )

Les techniques du 21ème siècle - génétique, nanotechnologie et robotique (GNR) - sont si puissantes qu'elles peuvent couvrir des nouvelles classes entières d'accidents et d'abus. D'une façon particulièrement dangereuse, pour la première fois, ces accidents et abus sont largement à la portée d'individus ou de petits groupes. Ils n'exigeront pas de grands équipements ou des matières premières rares. Le savoir seul suffira à leur utilisation. ( ... )

Étant donné le pouvoir incroyable de ces nouvelles techniques, ne devrions nous pas demander comment nous pouvons au mieux coexister avec elles ? Et si notre propre extinction est un résultat probable, ou même possible, de notre développement technique, ne devrions nous pas procéder avec beaucoup de précautions ? ( ... )

Pourquoi l'avenir n'a pas besoin de nous.

piecesetmaindoeuvre

dimanche 20 juin 2010

La fabrication du Consentement par Noam Chomsky



Diane Arbus


Le parti des travailleurs socialistes, lui, n’a rien d’illégal, mais il ne représente aucun puissant intérêt. Il n’y eut donc aucun scandale lorsque fut rendu public, au moment même où les passions atteignaient leur zénith au sujet du Watergate, que le FBI en avait pendant plus de dix ans entravé les activités au moyen de descentes illégales et autres mesures du même ordre, une violation des principes démocratiques bien plus étendue et grave que tout ce qui fut évoqué au cours des auditions du Watergate.

Le gigantesque scandale du Watergate, tel qu’il fut décrit dans la presse à grand tirage, tenait dans le fait que l’administration Nixon avait envoyé un ramassis de petites frappes pénétrer par effraction, pour des raisons demeurées obscures, dans le bâtiment du quartier général du parti démocrate. Ce parti représente de puissants intérêts nationaux, solidement ancrés dans le monde des affaires. L’attitude de Nixon était donc vraiment scandaleuse. 

Le parti des travailleurs socialistes, lui, n’a rien d’illégal, mais il ne représente aucun puissant intérêt. Il n’y eut donc aucun scandale lorsque fut rendu public, au moment même où les passions atteignaient leur zénith au sujet du Watergate, que le FBI en avait pendant plus de dix ans entravé les activités au moyen de descentes illégales et autres mesures du même ordre, une violation des principes démocratiques bien plus étendue et grave que tout ce qui fut évoqué au cours des auditions du Watergate.

En outre, ces actions de la police politique nationale n’étaient qu’un aspect parmi d’autres de programmes gouvernementaux impliquant de nombreuses administrations et qui visaient à mettre à bas toute action politique indépendante, à provoquer une montée de la violence dans les ghettos et à saper des mouvements populaires qui étaient en train de politiser des pans généralement marginalisés de la population.

Ces programmes secrets, parfaitement illégaux, furent mis à jour, entre autre devant des tribunaux, pendant la période du Watergate, mais ils ne furent jamais abordés lorsque le Congrès instruisit l’impeachment [de Nixon] et reçurent peu d’attention médiatique. Même la complicité reconnue du FBI dans l’assassinat d’un leader des Black Panthers par la police de Chicago n’était pas un scandale, contrastant avec la « liste noire » de Nixon, sur laquelle figuraient des personnes puissantes qui furent dénigrées en privé mais sans conséquences. ( ... )

Les scandales de l’Irangate et leur traduction médiatique nous enseignent exactement la même chose. Ce fut un scandale épouvantable lorsqu’on s’aperçut que l’administration Reagan avait violé les prérogatives du Sénat lors de l’Irangate ; mais pas un scandale du tout lorsqu’elle traita par le mépris l’arrêt de la Cour internationale de justice condamnant les États-Unis, en raison de l’attaque contre le Nicaragua, pour « usage illégal de la force » et violation de traités – c’est-à-dire pour violation de la Constitution américaine et du droit international.

Le soutien et le financement d’un terrorisme d’État qui fit près de deux cent mille morts en Amérique centrale dans les années 1980 ne firent l’objet d’aucune enquête du Congrès et laissèrent les médias parfaitement indifférents. Ces actions étaient menées en accord avec un consensus des élites et purent bénéficier du soutien inconditionnel des médias, ainsi que nous avons pu le constater en étudiant le sort des victimes dignes ou indignes d’intérêt, ou le traitement médiatique des élections dans les États clients et les autres . ( ... )

http://inventin.lautre.net/livres/Chomsky-Fabrication-du-Consentement.pdf




La fabrication du Consentement par Noam Chomsky



Prenez le sport - c’est un autre exemple crucial, selon moi, du système d’endoctrinement. Cela permet aux gens de prêter une grande attention à des choses de peu d’importance. C’est une manière de les tenir à distance des choses qui sont comptent pour leurs existences, et qu’ils pourraient avoir envie de vouloir changer.

Et il est frappant de voir l’intelligence qui est mobilisée par des gens ordinaires dans les discussions sur le sport, alors qu’ils n’utilisent pas ces mêmes capacités pour ce qui concerne la réflexion politique et sociale. Si vous écoutez les interventions des auditeurs dans les émissions sportives à la radio, ils vont entrer dans les analyses les plus inouïes, disséquer les subtilités les plus ésotériques. Et la presse exploite indéniablement de telles propensions.

Je me rappelle, au collège, je me suis demandé soudain : « Pourquoi ça m’importe que notre équipe gagne ? Je ne connais personne de l’équipe. Ils n’ont rien à voir avec moi. Pourquoi je supporte cette équipe ? Pourquoi j’applaudis ? Cela ne veut rien dire, cela n’a aucun sens. »

Mais en fait cela a un un sens. C’est une façon de créer des attitudes irrationnelles de soumission à l’autorité. De créer un esprit de cohésion de groupe derrière des leaders. Cela entraîne la population à être exploitée par le moyen du chauvinisme. C’est une caractéristique que l’on retrouve dans tous les sports de compétition. En examinant ces choses de près, on réalise qu’elles remplissent des fonctions et c’est pourquoi tant d’énergie est investie pour les promouvoir, leur donner des assises, etc.

http://chomsky.fr

Entre silence et hostilité : les médias « accueillent » Chomsky à Paris

Quelle est la différence entre un optimiste et un pessimiste ?

L'optimiste pense que l'on vit dans le meilleur des mondes possibles.
Le pessimiste pense que malheureusement c'est vrai.