samedi 6 avril 2019

" Egarement de la raison démontré par les ridicules des sciences incertaines. " par Charles Fourier ( 1806 )


Si l’on veut glacer tous les esprits, il suffit de prononcer le mot de métaphysique. Cette science, affectée à l’étude de l’âme, est un objet d’effroi pour quiconque possède une âme; elle figure dans le monde savant comme la ronce dans un bouquet.




Bien différents de Midas qui changeait le cuivre en or, les métaphysiciens ont eu l’art de changer l’or en cuivre, et de reléguer au dernier rang leur science qui devait tenir le sceptre du monde scientifique. C’était à eux de dissiper les charlataneries de la superstition, de la politique et de la morale, qui prétendent diriger les affaires sociales; c’était à eux de censurer les opérations de Dieu, déterminer les devoirs de Dieu envers nous et ses plans sur l’ordre des sociétés humaines.

Mais à quoi la métaphysique s’est-elle arrêtée ? A des arguties sur les sensations, les abstractions et les perceptions. Cette broutille méritait-elle d’occuper la science chargée de résoudre le grand problème des destinées, le problème de l’harmonie universelle ?

Comme théorie des êtres immatériels, la métaphysique est le seul juge qui puisse s’interposer entre Dieu et les sciences humaines; elle seule peut discuter si Dieu a rempli ses devoirs envers les créatures, et si les sciences ont pénétré et secondé les vues de Dieu. En la voyant renoncer à de si hautes fonctions pour se jeter dans les enfantillages de l’idéologie, ne peut-on pas lui dire:
Comment en un plomb vil l’or pur s’est-il changé ?

Etrange (fatalité) bizarrerie! tandis que chaque science s’efforce d’étendre son domaine et d’empiéter au-delà de ses attributions, la métaphysique seule abandonne ses privilèges, et n’ose pas raisonner librement sur les oeuvres de Dieu dont elle est seule juge compétent. Il est désolant de penser que la stupeur, la pusillanimité de cette classe de savants prive depuis 2 500 ans le genre humain de la connaissance des lois divines et des destinées (oui, tous les malheurs que le genre humain éprouve depuis 25 siècles sont dûs à la couardise des métaphysiciens).

(En l’absence de lois, à défaut de lois divines, il était naturel que les hommes établissent les leurs; c’est ce qui a donné lieu à trois classes de charlatanerie, la superstition, la politique et la morale, sciences dont les auteurs essaient de diriger l’ordre social et de suppléer au défaut des lois divines). A défaut de lois divines trois sciences sont intervenues pour diriger le mouvement social, ce sont ( la superstition, la Politique, la Morale et l’Economie ). Toutes trois de concert ont établi [un principe] qui est le fondement de toutes les erreurs.

Elles ont enseigné que la raison humaine peut de son chef, et sans le secours de la révélation divine, inventer un ordre social qui fera le bonheur des humains. Cette opinion exclut Dieu de la direction du mouvement social pour la livrer aux philosophes qui ont de temps immémorial conduit le genre humain d’abîmes en abîmes, autant de fois qu’ils ont pu tenir les rênes de l’administration.

Tandis que ces 3 sciences ( la superstition, l’économie, la politique et la morale ) partagent la dépouille de Dieu, la direction du mouvement social, on voit régner partout les trois dégénérations physique, politique et morale, qui attestent la dégradation du genre humain, et l’imbécillité des sciences qu’il a choisies pour guides. En voyant cette malheureuse civilisation, qui, après 25 siècles d’études, marche de révolutions en révolutions, de tortures en tortures, qu’attendez-vous, métaphysiciens, d’attaquer en masse les 3 sciences qui remplissent si mal les fonctions de Dieu qu’elles se sont arrogées ?

La censure des ( superstitieux) économistes, des politiques et des moralistes n’appartient qu’à vous seuls. Les attributions s’étendent à déterminer nos destinées en cette vie et en l’autre, et à confondre tous les charlatans qui prétendent remplir cette tâche. Mais, en vous donnant pour esprits forts, vous vous laissez paralyser par la superstition. C’est ce que je vais vous démontrer par une dissertation sur les 2 problèmes qui étaient le principal objet de votre science. Ces deux problèmes sont les analyses de nos destinées en ce monde et en l’autre.

Je reproduis ici la thèse sur l’insuffisance de la raison sans révélation. J’ai dit précédemment — au prospectus en d’autres termes — ou Dieu ne veut pas le bonheur des hommes, et dans ce cas la philosophie ne peut rien pour eux, ou bien s’il veut notre bonheur, il a du préparer, pour nous y conduire, d’autres voies que la Civilisation, et d’autres guides que les sciences incertaines trop convaincues d’empirisme par 25 siècles de tourment qu’elles nous ont causé.

Tel était le premier débat qu’il fallait élever sur l’impéritie des sciences incertaines. On a bien osé douter des sciences les plus fixes; on a vanté avec raison Descartes, qui le premier appliqua le doute à toutes les connaissances acquises. Pourquoi donc ne douterait-on pas des prétendues lumières qu’on doit à (la superstition) l’économisme, à la politique et à la morale ?

Le règne de ces trois sciences n’ayant produit que les révolutions et l’indigence, il fallait les condamner en masse sur le vice de leurs[ ], et les signaler comme visions scientifiques, aberrations (licences) du génie et absence de l’esprit divin.

http://gen.lib.rus.ec/fiction/?q=Charles+Fourier&criteria=&language=French&format=

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