lundi 29 juin 2009

« pseudo-crise » à Trinité-et-Tobago



Pendant des années, des rumeurs avaient couru au sujet de la participation des institutions financières internationales à la création de « pseudo-crises », (…)




 Le témoignage le plus détaillé vient de Davison Budhoo, employé du FMI passé à la dénonciation,(…)

Lorsque l’organisation effectua un virage à droite prononcé, à l’ère du thatchérisme et du reaganisme, Budhoo, d’une grande indépendance d’esprit, se sentit de plus en plus mal à l’aise dans son milieu de travail.

 Le FMI était désormais truffé de Chicago Boys soumis à l’autorité de Michel Camdessus, économiste néolibéral convaincu. Après avoir quitté son poste en 1988, Budhoo décida de consacrer sa vie à dévoiler les secrets de son ancien employeur. Tout commença par la remarquable lettre ouverte qu’il adressa à Camdessus, (…)

Manifestant pour le langage un enthousiasme rare chez les économistes en chef du Fonds, Budhoo commençait sa lettre en ces termes :

« Aujourd’hui, je démissionne de mon poste au Fonds monétaire international après douze années de services et 1000 jours de travail sur le terrain ; période au cours de laquelle j’ai fait avaler votre médecine et vos tours de passe-passe aux peuples d’Amérique latine, des Antilles et de l’Afrique. Cette démission est pour moi une inestimable libération : c’est le premier pas que je franchis dans l’espoir de laver un jour mes mains de ce qui, dans mon esprit, représente le sang de millions de pauvres et d’affamés. (…)

Parfois j’ai l’impression qu’il n’y aurait pas assez de savon dans le monde pour me laver des gestes que j’ai commis en votre nom. »

Budhoo entreprend ensuite d’étayer ses accusations. Il reproche au FMI d’utiliser les statistiques comme une arme « mortelle » . Avec force détails, il montre comment, en tant qu’employé du FMI, au milieu des années 1980, il a été mêlé à des cas de « fraudes statistiques » visant à exagérer les chiffres contenus dans les rapports du FMI concernant Trinité-et-Tobago, riche en pétrole, afin de donner l’impression que le pays était beaucoup plus instable qu’il ne l’était en réalité. (…)

Ces « irrégularités grossières » , qui, selon Budhoo , étaient délibérées et non le résultat de calculs bâclés, furent acceptées telles quelles par les marchés financiers, qui rangèrent Trinité-et-Tobago dans la catégorie des mauvais risques et mirent fin à son financement. Les problèmes économiques du pays – déclanchés par une diminution subite du prix du pétrole, sa principale exportation – devinrent rapidement catastrophiques, et il fut contraint de supplier le FMI de le tirer d’affaire.

 Le Fond exigea en contrepartie l’acceptation de ce que Budhoo appelle « sa médecine la plus mortelle » : licenciements, diminution de salaire et « toute la panoplie » des politiques d’ajustement structurel. Selon Budhoo il s’agissait d’ « un subterfuge visant à priver sciemment Trinité-et-Tobago d’une porte de sortie économique » et à « détruire l’économie du pays pour la reconvertir ensuite ». (…)

Après la publication de la lettre, le gouvernement de la Trinité commanda deux études indépendantes pour faire la lumière sur les accusations qu’elle contenait, qui se révélèrent fondées : le FMI avait bel et bien gonflé et fabriqué des chiffres, entraînant des effets dévastateurs sur le pays.(23) (…)

En 1996, on tira toutefois de la lettre une pièce intitulée Mr. Budhoo’s Letter of resignation from the I.M.F. ( 50 Years Is Enouth ), qui fut présentée dans un petit théâtre de l’East Village à New York.

 La production reçut un accueil étonnamment élogieux de la part du New York Times, qui, dans une courte critique, loua sa « rare créativité », et ces « accessoires inventifs ». Le nom de Budhoo était apparu pour la première et la dernière fois dans le New York Times.

(23) « Bitter Calypsos in the Caribbean », Guardian (Londres), le 30 juillet 1990 ;
Robert Weissman, « Playing with Numbers : The IMF’s Fraud in Trinidad and Tobago », Multinational Monitor, vol 11, n° 6, juin 1990.

« La stratégie du choc » par Naomi Klein ( Actes Sud ) pages 315-317.

Articles de Naomi Klein

« La stratégie du choc » par Naomi Klein  

http://inventin.lautre.net/livres/Klein-La-strategie-du-choc.pdf

mardi 23 juin 2009

"De la méthode des études de notre temps" par Giambattista Vico (1708)


La critique de la « critique » à laquelle Vico se livre dans le De ratione aboutit à ce reproche fondamental : fascinée par la rigueur du modèle mécaniste, la culture moderne se consacre entièrement à l’étude du monde naturel et néglige presque totalement l’étude de l’homme moral et de l’homme civil, parce que le monde humain, livré au libre arbitre et à l’occasion, ne relève pas d’une véritable « science ». 



Il s’agit là d’un renversement total de la perspective de la culture antique, qui était essentiellement « politique », dans la mesure où, chez elle, « la science du raisonnement, celle de la nature, celle de l’âme humaine « étaient subordonnées à la « prudence civile », cette finalité politique donnant à l’éducation, qui est la formation de futurs citoyens et non de simples individus, sa cohérence et sa pleine efficacité. Montesquieu, si proche à tant d’égards de Vico, fera la même constatation : « Chez les Grecs et les Romains, l’admiration pour les connaissances politiques et morales fut portée jusqu’à une espèce de culte. Aujourd’hui nous n’avons d’estime que pour les sciences physiques, nous en sommes entièrement occupés, et le bien et le mal politiques sont, parmi nous, un sentiment, plutôt qu’un objet de connaissance [...]

On a, dans notre siècle, donné un tel degré d’estime aux connaissances physiques que l’on [n’]a conservé que de l’indifférence pour les morales». Là encore, Descartes est exemplaire. « Spectateur plutôt qu’acteur en toutes les comédies qui se jouent dans le monde », pensant que la meilleure occupation qu’il peut avoir dans la vie est de s’employer à cultiver sa raison et à avancer autant qu’il le pourra en la connaissance de la vérité selon la méthode qu’il s’est prescrite, il dénie au philosophe, simple particulier, toute compétence à s’occuper de réformer l’État. Le philosophe moderne n’a plus la vocation « politique » que lui reconnaissaient Platon, Aristote ou Cicéron, il doit se consacrer à la « théorie », à la métaphysique et à la science. 

Quand il s’agit des affaires de l’État, il s’en remet aux Grands (mais qui les conseillera ?) et se réfugie dans le conservatisme et le conformisme systématiques (teintés, chez Pascal, d’un pessimisme cynique). Il n’en peut aller autrement, pense Vico, puisque l’idéal moderne de la science n’admet, comme valeur suprême, que la vérité, et n’est donc pas applicable au monde de la praxis, c’est-à-dire, au sens grec, de l’action politique. La seule pratique que la science moderne puisse concevoir, c’est la practica theoriae, l’application d’une théorie scientifique, qui tire son efficacité de la validité de la théorie elle-même. Or il ne peut y avoir de théorie « scientifique » de l’action politique, qui n’est ni nécessaire ni géométriquement déductible, et reste soumise à la contingence, au hasard, aux circonstances, à un temps qui n’est pas celui de la mécanique. On est alors réduit à abandonner la politique au « sentiment », comme disait Montesquieu, ou plutôt à la routine empirique, ou, pis encore, à l’habileté du « machiavélisme ». (…)

Vico, dans le De ratione, rallume cette querelle qui semblait désormais close au profit des sciences de la nature et de ces sciences mathématiques dont les idéalités, créées par l’homme, lui permettent de parvenir à une certaine intelligence des réalités physiques et à leur manipulation. Il croit que l’homme ne vit pas seulement en savant et en technicien, en chercheur professionnel de vérité. Il vit aussi, et d’abord, comme le savaient les anciens, en défricheur de la grande forêt primordiale, en constructeur de cités, en législateur, c’est-à-dire en poète, en créateur de mots, en raconteur de fables et d’histoires. 

Il habite en homme le monde, en délimitant et marquant des « lieux » qui lui soient communs avec les autres hommes, qui soient des lieux humains. Et c’est ce défrichement, ce travail « toponymique » de l’homme « topique » qui a permis l’apparition de ce tard-venu, fragile et plein de démesure, qu’est l’homme « critique ». Les avertissements de Vico, adressés à des jeunes gens, en 1708, à l’aube du siècle des Lumières et de la raison triomphante, avaient peu de chance d’être entendus. Mais les idées ont aussi leurs ricorsi et viennent en appel. Notre modernité a perdu ses certitudes massives, et il n’y a pas besoin de tirer Vico vers elle, c’est elle qui vient à lui. Beaucoup de ses questions sont à nouveau les nôtres. Le temps de la prudence est revenu.

traduction du texte intégral avec présentation par Alain Pons ( PDF )

dimanche 14 juin 2009

" Nanotechnologies"


“La sécurité est très souvent vécue dans nos sociétés démocratiques comme une atteinte aux libertés individuelles. Il faut donc faire accepter par la population les technologies utilisées et parmi celles-ci la biométrie, la vidéosurveillance et les contrôles.


Plusieurs méthodes devront être développées par les pouvoirs publics et les industriels pour faire accepter la biométrie. Elles devront être accompagnées d’un effort de convivialité par une reconnaissance de la personne et par l’apport de fonctionnalités attrayantes :

• Éducation dès l’école maternelle, les enfants utilisent cette technologie pour rentrer dans l’école, en sortir, déjeuner à la cantine, et les parents ou leurs représentants s’identifieront pour aller chercher les enfants.

• Introduction dans des biens de consommation, de confort ou des jeux : téléphone portable, ordinateur, voiture, domotique, jeux vidéo.

• Développer les services « cardless » à la banque, au supermarché, dans les transports, pour l’accès Internet... La même approche ne peut pas être prise pour faire accepter les technologies de surveillance et de contrôle, il faudra probablement recourir à la persuasion et à la réglementation en démontrant l’apport de ces technologies à la sérénité des populations et en minimisant la gène occasionnée. Là encore, l’électronique et l’informatique peuvent contribuer largement à cette tâche.”

“Livre Bleu” du GIXEL

“Au niveau médical, les assureurs pourraient varier leurs tarifs selon si vous avez ou non sous la peau des puces de diagnostic précoce. Des personnes peuvent estimer que cela va à l’encontre de leur vie privée, qu’on pourrait les pister à distance. On peut aussi se demander comment se comporteront les nanoparticules dans l’environnement. Ce n’est pas au scientifique de répondre à ses questions, mais au citoyen.” (Jean Therme directeur du CEA Grenoble).

L’aiguillage vers les labos et les programmes de recherche en nanotechnologies de gigantesques flux de crédits ne vise pas seulement à s’assurer la suprématie lors du prochain cycle militaro-industriel. Il existe au-delà tout un courant fondateur et dominant des nano-sciences (Eric Drexler, Ray Kurzweil, Marvin Minsky, Hans Moravec, Mihail Roco, William S. Bainbridge, etc) qui, sous des noms divers : "cyborg", "successeur", "mutant", vise à l’avènement de l’homme-machine. Roboman, si l’on veut, censé être la version technoïde du surhomme nietzchéen. "Ceux qui décideront de rester humains et refuseront de s’améliorer auront un sérieux handicap", déclare le cybernéticien Kevin Warwick ( Libération , 11-12/05/02). "Ils constitueront une sous-espèce et formeront les chimpanzés du futur."

Il se trouve justement que William Bainbridge a publié en 1985 un livre intitulé “ Génétique culturelle ”. Et il développe dans le rapport NBIC les perspectives de la mémétique (pp. 318 et suivantes) : “ Certaines idées peuvent avoir la force de "virus sociaux" aux effets aussi délétères que des virus biologiques ”, explique-t-il dans ce rapport. Il propose donc d’“ étudier la culture avec les méthodes de la bioinformatique ” et recommande une initiative analogue au projet Génome humain, le “ Human Cognome Project ”, pour “ comprendre et maîtriser les mystères du génome culturel ”].

On arrive ici au point culminant de cette nouvelle idéologie. Sa prétention est de décrire les “ automates mentaux ” de façon à les maîtriser puis les manipuler. Les courants de pensée deviennent des objets quantifiables. De même que l’on a abandonné la compréhension de la vie avec le gène, on abandonne celle de la pensée avec la neuroéthique (qui vise à localiser les aires de la morale ou de la religion) puis avec la mémétique. “ C’est seulement si nous renonçons à une explication de la vie au sens commun du mot que s’offre à nous une possibilité de prendre en compte ce qui la caractérise. ” estimait Niels Bohr.

“ Dans la science moderne, la mathématisation de la nature s’est imposée comme une fin en soi ”, souligne le mathématicien Olivier Rey [9]. Mais avec elle, “ le monde n’est pas compris, il est mathématisé : par là il est fonctionnalisé mais il ne reçoit aucun sens. Au contraire tout sens lui est ôté : l’homme n’y trouve plus rien qui lui parle. ”

[9] O. Rey (2003) Itinéraire de l’égarement. Du rôle de la science dans l ’absurdité contemporaine, Seuil Paris.

Pièces et Main d'Œuvre

vendredi 5 juin 2009

« Françafrique : les médias complices ? » par François-Xavier Verschave


 Entre la fin 1998 et la fin 1999, il y a eu au Congo-Brazzaville dans une guerre pilotée depuis l’Elysée, plus de morts et de viols qu’au Kosovo, en Tchétchénie et à Timor-Est réunis.

Regardez la couverture médiatique de ces trois événements, les milliers de pages qui y ont été consacrées, voyez à présent ce que vous avez pu lire sur le Congo Brazzaville... 


En 1990 un mouvement populaire renverse le dictateur Sassou Nguesso. Une constitution est votée presque à l’unanimité, un président est élu. Celui-ci a le malheur de demander 33 % de royalties sur le pétrole au lieu des 17 % de Sassous Nguesso : un quasi doublement. On peut dire que c’est un crime de lèse Françafrique. Dès lors, les réseaux s’activent pour préparer le retour au pouvoir de Sassou Nguesso, au terme d’une sanglante guerre civile.

Récemment, Jean-Charles Marchiani a fait un aveu époustouflant dans Le Monde : il a déclaré que la négociation qu’il avait menée au nom du ministre de l’Intérieur avec l’Angola avait pour but le renforcement de l’action de la France dans cette région et pour résultat l’intervention militaire de l’Angola dans les deux Congo. Autrement dit, alors que la France déclare une politique de non-ingérence, elle arme l’Angola pour intervenir dans deux des plus sanglantes guerres civiles d’Afrique. C’est extraordinaire, et je m’étonne qu’il n’y ait pas eu d’avantage de gens pour relever cet aveu fantastique.

Donc, via ses vrais faux mercenaires, via la présence d’un contingent angolais, d’un contingent tchadien jouant les tirailleurs sénégalais, via la présence de génocidaires du Rwanda et de résidus de la garde de Mobutu, la France a renversé le régime qui avait été installé au terme du processus démocratique. Tout cela est relativement commun. Mais comme le nouveau régime de Sassous Nguesso a recommencé son pillage et ses persécutions, la guerre civile a redémarré fin 1998. Entre la fin 1998 et la fin 1999, il y a eu au Congo-Brazzaville dans une guerre pilotée depuis l’Elysée, plus de morts et de viols qu’au Kosovo, en Tchétchénie et à Timor-Est réunis.

Regardez la couverture médiatique de ces trois événements, les milliers de pages qui y ont été consacrées, voyez à présent ce que vous avez pu lire sur le Congo Brazzaville... Durant cette guerre terrible, il y a eu aussi des dizaines de milliers de viols systématiques à caractère ethnique. Quasiment rien dans la presse. Pourquoi ? Tous les reporters ont été dissuadés de s’y rendre. Des équipes en ont été empêchées. Il s’est abattu un "noir silence" total sur une guerre qui a détruit un pays et qui a comporté au moins quatre crimes contre l’humanité successifs. (...)

acrimed

survie

lmsi

lundi 1 juin 2009

"Bolkestein : silence on contourne !" par Gilles Karpman


"Commençons par souligner quelques évidences. Le projet rédigé par Frits Bolkestein ne devait être qu'une directive, ce qui veut dire que son effet juridique entier ne surviendrait qu'au terme d'un délai et après transposition en droit interne par les Etats membres. 


Le règlement 563/2008 du 17 Juin 2008 est lui en tant que tel, applicable directement par les tribunaux des Etats membres, sans avoir besoin d'un fastidieux et aléatoire examen pour transposition par les parlements des Etats concernés. Ce règlement trouvera donc, sans autre formalité, à s'appliquer à tous les contrats signés à compter du 17 décembre 2009. Contrairement à la directive services, le règlement s'appliquera bien au droit du travail (article 8 du règlement)

Ces quelques précisions pour qu'il soit parfaitement clair qu'il ne s'agit pas là d'un projet, d'un truc dont on cause, mais d'une règle bel et bien applicable dès fin 2009. A cette date, une entreprise et un salarié français exerçant ses talents en France, pourront parfaitement convenir en toute liberté que la loi applicable à leur rapport sera celle du Yémen du Sud. Ceci ressemble étrangement à la règle du pays d'origine qui avait soulevé tant d'opposition et provoquée tant d'émoi, mais en beaucoup plus puissant. En effet cette règle s'applique à tous les contrats y compris de travail et permet aux parties de choisir et de changer à tout moment la loi applicable à leurs relations, et cela pas seulement en optant pour une des législations des Etats membres mais en vertu d'un principe dit d'universalité (c'est beau) éventuellement pour n'importe quelle législation même extra communautaire (le plombier Kazakh fera-t-il autant jaser que son confrère polonais ? (...)

Idéeconsultants

« Le monde selon Monsanto » de Marie-Monique Robin


On découvre aussi comment Monsanto a su inspirer, pour ne pas dire dicter, l’absence de réglementation sur les cultures transgéniques. Dans une étonnante convergence de points de vue entre industriels et dirigeants politiques américains, républicains et démocrates, le fulgurant développement attendu des biotechnologies et la suprématie américaine en la matière ne devaient en aucun cas être entravés par une réglementation tatillonne.



Disons-le d’emblée : le documentaire de Marie-Monique Robin sur Monsanto, leader mondial des OGM, est violemment à charge. Et c’est là son principal défaut. Il confortera dans leurs camps retranchés respectifs les pro- et les anti-OGM, les seconds stigmatisant la multinationale faisant son OPA sur les semences de la planète, les premiers dénonçant le caractère partial du film. On imagine d’ailleurs aisément que l’entreprise, experte en stratégie et communication, a sciemment refusé d’y participer pour mieux en dénoncer la crédibilité.

Il ne faudrait cependant surtout pas s’arrêter à cette critique. Car la journaliste a mené une enquête fouillée, s’est procuré des liasses de documents confidentiels et a rencontré aux États-Unis nombre de protagonistes de premier plan qui ont eu maille à partir avec Monsanto : scientifiques, personnalités politiques, membres d’ONG et surtout responsables des autorités chargées de la réglementation.

Se dévoile ainsi l’histoire de Monsanto qui, avant d’être une multinationale des biotechnologies, fut l’une des plus grandes entreprises chimiques prospérant avec la vente de produits hautement toxiques (PCB, dioxines, agent orange…) en masquant leurs effets délétères - on en apprend beaucoup plus sur le passé de Monsanto dans l’ouvrage que publie l’auteur (Ed. La Découverte).

On découvre aussi comment Monsanto a su inspirer, pour ne pas dire dicter, l’absence de réglementation sur les cultures transgéniques. Dans une étonnante convergence de points de vue entre industriels et dirigeants politiques américains, républicains et démocrates, le fulgurant développement attendu des biotechnologies et la suprématie américaine en la matière ne devaient en aucun cas être entravés par une réglementation tatillonne. Les autorités réglementaires s’employèrent avec zèle à exaucer ce voeu et à tenter d’imposer les OGM sur la planète.

Gerard Ponthieu


  Combat Monsanto


À la formulation d’une hypothèse classique selon laquelle les biotechnologies végétales constitueraient, pour l’entreprise américaine Monsanto, un choix stratégique en faveur de la biologie la repositionnant par rapport à la chimie, son métier d’origine, le film préfère prêter à Monsanto l’intention de « contrôler la nourriture » et les « populations du monde ». L’objet du reportage est de documenter cette opinion, mais force est de constater qu’il est truffé d’allégations pseudo-scientifiques. Comme la plupart des personnes convaincues par avance du caractère néfaste des OGM tout comme des motivations des entreprises biotechnologiques, la réalisatrice, non outillée pour faire le tri entre le vrai et le faux sur le plan scientifique, ne se montre ainsi perméable qu’aux seuls arguments allant dans le sens de ses a priori et expose aux téléspectateurs l’image d’un monde binaire, avec des bons et des méchants.
Marcel Kuntz, 3 mars 2008
Quelle est la différence entre un optimiste et un pessimiste ?

L'optimiste pense que l'on vit dans le meilleur des mondes possibles.
Le pessimiste pense que malheureusement c'est vrai.