mercredi 27 mars 2019

" Ce que tout révolutionnaire doit savoir de la répression; " par Victor Serge ( 1921-1925 )


À la vérité, la police russe était débordée. La sympathie instinctive ou consciente de l'immense majorité de la population allait aux ennemis de l'ancien régime. Leur martyre fréquent suscitait le prosélytisme de quelques-uns et l'admiration du grand nombre. Sur ce vieux peuple chrétien, la vie apostolique des propagandistes qui, renonçant au bien-être et à la sécurité, se vouaient, pour apporter aux misérables un évangile nouveau, à la prison, à l'exil des Sibéries, à la mort même, exerçait une influence irrésistible. Ils étaient bien le « sel de la terre » : les meilleurs, les seuls porteurs d'un immense espoir, et, pour cela, persécutés.


La victoire de la révolution en Russie a fait tomber entre les mains des révolutionnaires tout le mécanisme de la police politique la plus moderne, la plus puissante, la plus aguerrie, formée par plus de cinquante années d'âpres luttes contre les élites d'un grand peuple.

Connaître les méthodes et les procédés de cette police présente pour tout militant un intérêt pratique immédiat ; car la défense capitaliste emploie partout les mêmes moyens ; car toutes les polices, d'ailleurs solidaires, se ressemblent. La science des luttes révolutionnaires que les Russes acquirent en plus d'un demi-siècle d'immenses efforts et de sacrifices, les militants des pays où l'action se développe aujourd'hui vont devoir, dans les circonstances créées par la guerre, par les victoires du prolétariat russe et les défaites du prolétariat international – crise du capitalisme mondial, naissance de l'Internationale communiste, développement très net de la conscience de classe chez la bourgeoisie : fascisme, dictatures militaires, terreur blanche, lois scélérates –, les militants vont devoir se l'assimiler en un laps de temps beaucoup plus court, elle leur devient nécessaire dès aujourd'hui. 

S'ils sont bien avertis des moyens dont l'ennemi dispose, peut-être subiront-ils des pertes moindres… Il y a donc lieu, dans un but pratique, de bien étudier l'instrument principal de toutes les réactions et de toutes les répressions, cette machine à étrangler toutes saines révoltes qui s'appelle la police. Nous le pouvons, puisque l'arme perfectionnée que l'autocratie russe s'était forgée pour défendre son existence – l'Okhrana (la Défensive), Sûreté générale de l'Empire russe – est tombée entre nos mains. Cette étude, pour être poussée à fond, ce qui serait fort utile, exigerait des loisirs que n'a pas l'auteur de ces lignes. Les pages qu'on va lire n'ont pas la prétention d'y suppléer. Elles suffiront, je l'espère, à avertir les camarades et à dégager à leurs yeux une vérité importante qui me frappa dès la première visite aux archives de la police russe ; c'est qu'il n'est pas de force au monde qui puisse endiguer le flot révolutionnaire quand il monte, et que toutes les polices, quels que soient leur machiavélisme, leur science et leurs crimes, sont à peu près impuissantes…(...)

Désormais, toute action tendant à la destruction des institutions capitalistes a besoin d'être complétée par une préparation, au moins théorique, à l'œuvre créatrice de demain. « L'esprit destructeur, disait Bakounine, est aussi l'esprit créateur. » Cette profonde pensée, dont l'interprétation littérale a lamentablement égaré bien des révoltés, vient de devenir une vérité pratique. Le même esprit de lutte de classe porte aujourd'hui les communistes à détruire et créer simultanément. De même que l'antimilitarisme actuel a besoin d'être complété par la préparation de l'Armée rouge, le problème de la répression posé par la police et la justice bourgeoises a un aspect positif d'une grosse importance. J'ai cru devoir le définir à grands traits. Nous devons connaître les moyens de l'ennemi ; nous devons aussi connaître toute l'étendue de notre propre tâche. (...)

Le service de surveillance extérieure était le plus simple. Ses nombreux agents, dont nous possédons les photographies d'identité, payés 50 roubles par mois, avaient pour unique tâche de filer d'heure en heure, de nuit et de jour, sans interruption aucune, la personne qu'on leur désignait. Ils ne devaient connaître, en principe, ni son nom ni le but de la filature, par précaution sans doute contre une maladresse ou contre une trahison. La personne à filer recevait un surnom : le Blondla MénagèreVladimirle Cocher, etc. Nous retrouvons ce surnom en tête des rapports quotidiens, reliés et formant de gros cahiers, où les fileurs ont consigné leurs observations. Ces rapports sont d'une précision minutieuse et ne doivent pas contenir de lacune. Le texte en est généralement rédigé à peu près comme suit :

Le 17 avril, à 9 h 54 du matin, la Ménagère est sortie de chez elle, a mis deux lettres à la poste au coin de la rue Pouchkine ; est entrée dans plusieurs magasins du boulevard X ; est entrée à 10 h 30 rue Z, n° 13, en est ressortie à 11 h 20, etc.
Dans les cas les plus sérieux, deux agents filaient à la fois la même personne sans se connaître ; leurs rapports se contrôlaient et se complétaient.

Ces rapports quotidiens étaient remis à la gendarmerie pour y être analysés par des spécialistes. Ces fonctionnaires – limiers en chambre –, d'une dangereuse perspicacité, dressaient des tableaux synoptiques résumant les faits et les gestes d'une personne, le nombre de ses visites, leur régularité, leur durée, etc. ; par endroits, ces schémas permettaient d'apprécier l'importance des relations d'un militant et son influence probable. (...)

Le mécanisme le plus important de la police russe était à coup sûr son « agence secrète », nom décent du service de provocation dont les origines remontent aux premières luttes révolutionnaires et qui atteignit un développement tout à fait extraordinaire après la révolution de 1905.
Des policiers (dits : officiers de gendarmerie) spécialement formés, instruits et triés, procédaient au recrutement des agents provocateurs. Leurs succès plus ou moins grands dans ce domaine les classaient et contribuaient à leur avancement. Des instructions précises prévoyaient les moindres détails de leurs relations avec les collaborateurs secrets. Des spécialistes hautement rétribués réunissaient enfin en un faisceau tous les renseignements fournis par la provocation, les étudiaient, formaient et tenaient des dossiers.

Il y avait dans les bâtiments de l'Okhrana (Petrograd) une chambre secrète où n'entraient jamais que le directeur de la police et le fonctionnaire chargé d'y classer les pièces. C'était celle de l'agence secrète. Elle contenait notamment l'armoire à fiches des provocateurs – où nous avons trouvé plus de 35 000 noms. Dans la plupart des cas, par un surcroît de précautions, le nom de l'« agent secret » est remplacé par un sobriquet, ce qui fait que le travail d'identification de certains misérables dont, après la révolution, les dossiers complets tombèrent entre les mains des camarades, fut singulièrement difficile. Le nom du provocateur ne devait être connu que du directeur de l'Okhrana et de l'officier de gendarmerie chargé d'entretenir avec lui des relations permanentes. (...)


Doivent être considérés comme prédisposés à prendre du service
les révolutionnaires d'un caractère faible, déçus ou blessés par le parti, vivant dans la misère, évadés des lieux de déportation ou désignés pour la déportation.
L'Instruction recommande d'étudier « avec soin » leurs faiblesses et de s'en servir ; de converser avec leurs amis et parents, etc. ; de multiplier « en toute occasion les contacts avec les ouvriers, avec les témoins, les parents, etc., sans jamais perdre de vue le but »…
Étrange duplicité de l'âme humaine ! Je traduis littéralement trois lignes déconcertantes :
On peut se servir des révolutionnaires dans la misère qui, sans renoncer à leurs convictions, consentent par besoin à fournir des renseignements…
Il y en avait donc ?
Mais continuons.

Placer des moutons auprès des détenus est d'un usage excellent.
Quand une personne paraît mûre pour prendre du service – c'est-à-dire quand, sachant un révolutionnaire aigri, matériellement gêné, ébranlé peut-être par ses mécomptes personnels, on possède en outre contre lui quelques chefs d'inculpation assez graves pour le bien tenir en main :
Arrêter tout le groupe dont elle fait partie et conduire la personne en question chez le directeur de la police ; avoir contre elle des motifs de poursuites sérieux et se réserver pourtant la possibilité de la relâcher en même temps que les autres révolutionnaires incarcérés, sans provoquer d'étonnement.
Interroger la personne en tête à tête. Tirer parti pour la convaincre des querelles de groupes, des fautes des militants, des blessures d'amour-propre.

On croit entendre, en lisant ces lignes, le policier paterne s'apitoyer sur le sort de sa victime :
– Ah oui, pendant que vous irez aux travaux forcés pour vos idées, votre camarade X…, qui vous a joué de si bons tours, fera bonne chère à vos dépens. Que voulez-vous ? Les bons paient pour les mauvais !
Ça peut prendre – quand il s'agit d'un faible – ou d'un affolé que menacent des années de déportation…
Autant que possible, avoir plusieurs collaborateurs dans chaque organisation.
La Sûreté doit diriger ses collaborateurs et non les suivre.
Les agents secrets ne doivent jamais avoir connaissance des renseignements fournis par leurs collègues.

Et voici un passage que Machiavel n'eût pas désavoué :
Un collaborateur travaillant obscurément dans un parti révolutionnaire peut être élevé dans son organisation par des arrestations de militants plus importants.
Assurer le secret absolu de la provocation est naturellement l'un des plus grands soucis de la police.
L'agent promet le secret absolu ; à son entrée en service, il ne doit modifier aucunement ses façons de vivre.
Les relations avec lui sont entourées de précautions qu'il serait difficile de surpasser.


Des rendez-vous peuvent être assignés à des collaborateurs dignes de toute confiance. Ils ont lieu dans des appartements clandestins, composés de plusieurs pièces ne communiquant pas directement entre elles, où l'on puisse en cas de nécessité isoler différents visiteurs. Le tenancier du logis doit être un employé civil. Il ne peut jamais recevoir de visites personnelles. Il ne doit ni connaître les agents secrets ni leur parler. Il est tenu de leur ouvrir lui-même et de s'assurer avant leur sortie que personne ne vient dans l'escalier. Les entretiens ont lieu dans des chambres fermées à clé. Aucun papier n'y doit traîner. Avoir soin de ne jamais faire asseoir le visiteur ni près d'une fenêtre ni près d'un miroir. Au moindre indice suspect, changer d'appartement. (...)

Arrêtons-nous encore brièvement sur un cas de provocation comme l'histoire du mouvement révolutionnaire russe en connaît plusieurs : la provocation d'un chef de parti. Voici l'énigmatique figure de Malinovski.
Un matin de 1918 – lendemain de la révolution d'Octobre, année terrible : guerre civile, réquisitions dans les campagnes, sabotage des techniciens, complots, soulèvement des Tchécoslovaques, interventions étrangères, paix infâme (selon le mot de Lénine) de Brest-Litovsk, deux tentatives d'assassinat contre Vladimir Illitch –, un matin de cette année-là, un homme se présentait tranquillement chez le commandant du palais de Smolny (Petrograd) et lui disait : 

« Je suis le provocateur Malinovski. Je vous prie de m'arrêter. »
L'humour a sa place dans toutes les tragédies. Impavide, le commandant de Smolny faillit mettre à la porte cet importun. « Je n'ai pas d'ordres, moi ! Et ce n'est pas mon affaire de vous arrêter. » – « Alors, faites-moi conduire au comité du parti. » – Au comité, on reconnut avec stupéfaction l'homme le plus exécré, le plus méprisé du parti. On l'arrêta.

Sa carrière, en deux mots.
L'avers : une adolescence difficile ; trois condamnations pour vol. Très doué, très actif, militant de diverses organisations, si apprécié qu'en 1910 on lui offre d'entrer au comité central du Parti ouvrier social-démocrate russe et que la Conférence bolchevique de Prague (1912) l'y porte en effet. À la fin de la même année, député bolchevique à la IVe Douma d'Empire. Président en 1913 du groupe parlementaire bolchevik.
Le revers : indicateur de l'Okhrana (« Ernest », puis « le Tailleur ») dès 1907. À partir de 1910, appointements de 100 roubles par mois (c'est princier). L'ex-chef de la police Beletski dit : « Malinovski était l'orgueil de la Sûreté, qui s'attacha à en faire un des chefs du parti. » Fait arrêter des groupes bolcheviques à Moscou, Toula, etc. ; livre à la police Milioutine, Noguine, Maria Smidovitch, Staline, Sverdlov. Communique à l'Okhrana les archives secrètes du parti. Est élu à la Douma avec le concours aussi efficace que discret de la police…

Démasqué, reçoit du ministère de l'Intérieur une forte récompense et disparaît. Survient la guerre. Fait prisonnier aux armées, recommence à militer dans un camp de concentration. Rentre finalement en Russie, pour déclarer au tribunal révolutionnaire : « Faites-moi fusiller ! » Il soutint avoir énormément souffert de sa double existence, n'avoir vraiment compris la révolution que bien tardivement, s'être laissé entraîner par l'ambition et l'esprit d'aventure. Krylenko réfuta impitoyablement cette argumentation peut-être sincère : « L'aventurier joue sa dernière carte ! »
Une révolution ne peut s'attarder au déchiffrement des énigmes psychologiques. Elle ne peut pas non plus s'exposer au risque d'être une fois de plus trompée par un joueur trouble et passionné. Le tribunal révolutionnaire rendit le verdict réclamé à la fois par l'accusateur et l'accusé. Dans la même nuit, quelques heures plus tard, Malinovski, traversant une cour écartée du Kremlin, recevait à l'improviste une balle dans la nuque. (...)

Il n'y a pas que ces agents provocateurs par lâcheté ; il y a, beaucoup plus dangereux, les dilettanti, aventuriers qui ne croient en rien, blasés sur l'idéal qu'ils ont naguère servi, épris du danger, de l'intrigue, de la conspiration, d'un jeu compliqué où ils dupent tout le monde. Ceux-là peuvent avoir du talent, jouer un rôle à peu près indéchiffrable. Tel paraît bien avoir été Malinovski. La littérature russe de la période qui suivit la défaite de 1905 nous offre plusieurs cas psychologiques d'une perversion semblable. Le révolutionnaire illégal – surtout le terroriste – acquiert une trempe de caractère, une volonté, un courage, un amour du danger redoutables. Si, avec cela, il lui arrive, par suite d'une évolution mentale assez commune, de perdre, sous l'empire de menues expériences personnelles – échecs, déceptions, égarements intellectuels – ou de la défaite temporaire du mouvement, son idéalisme, que peut-il devenir ? S'il est réellement fort, il échappera à la neurasthénie et au suicide ; mais ce sera quelquefois pour devenir un aventurier sans foi, auquel tous les moyens peuvent paraître bons pour atteindre ses buts personnels. Et la provocation est un moyen que l'on tentera sûrement de lui proposer. (...)

La provocation, en atteignant une telle ampleur, devint par elle-même un danger pour le régime qui s'en servait et surtout pour les hommes de ce régime. On sait, par exemple, que l'un des plus hauts fonctionnaires du ministère de l'Intérieur, le policier Ratchkovski, connut et sanctionna les projets des exécutions de Plehve et du grand-duc Serge. Stolypine, bien au courant de ces choses, se faisait accompagner dans ses sorties par le chef de la police Guerassimov, dont la présence lui paraissait une garantie contre les attentats commis à l'instigation de provocateurs. Stolypine fut d'ailleurs tué par l'anarchiste Bogrov qui avait appartenu à la police.(...)

Et puis, on aurait tort de se laisser impressionner par le schéma du mécanisme apparemment si perfectionné de la Sûreté impériale. Il y avait bien au sommet quelques hommes intelligents, quelques techniciens d'une haute valeur professionnelle : mais toute la machine reposait sur le travail d'une nuée de fonctionnaires ignares. Dans les rapports les mieux confectionnés, on trouve les énormités les plus réjouissantes. L'argent huilait tous les engrenages de la vaste machine ; le gain est un stimulant sérieux, mais insuffisant. Rien de grand ne se fait sans désintéressement. Et l'autocratie n'avait pas de défenseurs désintéressés. (...)

En 1917, l'autocratie s'est effondrée sans que ses légions de mouchards, de provocateurs, de gendarmes, de bourreaux, de sergents de ville, de cosaques, de juges, de généraux, de popes puissent retarder encore le cours inflexible de l'histoire. Les rapports de l'Okhrana rédigés par le général Globatchev constatent l'approche de la révolution et prodiguent au tsar des avertissements inutiles. De même que les plus savants médecins appelés au chevet d'un moribond ne peuvent que constater, minute à minute, les progrès de la maladie, les policiers omniscients de l'Empire voyaient, impuissants, le tsarisme rouler aux abîmes…

Car la révolution était le fruit des causes économiques, psychologiques, morales, situées au-dessus d'eux et en dehors de leur atteinte. Ils étaient condamnés à lui résister inutilement et à succomber. Car c'est l'éternelle illusion des classes gouvernantes de croire que l'on peut enrayer les effets sans atteindre les causes, légiférer contre l'anarchie ou le syndicalisme (comme en France et aux États-Unis), contre le socialisme (comme Bismarck le fit en Allemagne), contre le communisme comme on s'y évertue aujourd'hui un peu partout. Vieille expérience historique. L'Empire romain, lui aussi, persécuta vainement les chrétiens. Le catholicisme couvrit l'Europe de bûchers, sans réussir à vaincre l'Hérésie, la Vie.

À la vérité, la police russe était débordée. La sympathie instinctive ou consciente de l'immense majorité de la population allait aux ennemis de l'ancien régime. Leur martyre fréquent suscitait le prosélytisme de quelques-uns et l'admiration du grand nombre. Sur ce vieux peuple chrétien, la vie apostolique des propagandistes qui, renonçant au bien-être et à la sécurité, se vouaient, pour apporter aux misérables un évangile nouveau, à la prison, à l'exil des Sibéries, à la mort même, exerçait une influence irrésistible. Ils étaient bien le « sel de la terre » : les meilleurs, les seuls porteurs d'un immense espoir, et, pour cela, persécutés.

Ils avaient ainsi pour eux la seule puissance morale, celle des idées et des sentiments. L'autocratie n'était plus un principe vivant. Nul ne croyait à sa nécessité. Elle n'avait plus d'idéologues. La religion même, par la bouche de ses penseurs les plus sincères, condamnait un régime qui ne reposait plus que sur l'emploi systématisé de la violence. Les chrétiens les plus grands de la Russie moderne, doukhobors et tolstoïens, ont été des anarchistes. Or une société qui ne repose plus sur des idées vivantes, dont les principes fondamentaux sont morts, peut tout au plus se maintenir quelque temps par la force d'inertie.

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